J'ai acheté des CD depuis 1986 (et plein de vinyles avant), j'y ai mis énormément d'argent. J'en ai souvent racheté (remasterisations, bonus tracks...) et aujourd'hui tout ça ne vaut plus rien. Les rayons se vident au profit des DVD, des blu-ray disc (tout pour les yeux, rien pour les oreilles), en attendant le prochain format.

Et pourtant... c'était pas beau tout ça ?


- - - Disapproved by the Central Scrutinizer - - -

lundi 12 septembre 2011

#12 : Steve Forbert "Jackrabbit Slim"


Allez, on n'exagère pas. Cet album n'est pas un chef-d'oeuvre intemporel et méconnu. Je me force à le dire, parce que pour moi personnellement, il n'en est pas loin, mais soyons objectifs. L'histoire est simple. En 1979, Dylan pète les plombs, rencontre Dieu et évangélise à tout-va, pendant que Springsteen, après la sortie de Darkness on the Edge of Town, règne en maître sur le rock américain, donne des concerts marathons et mémorables dans toute l'Amérique. Pour CBS, leur maison de disque commune, ça se complique : avant, on cherchait simplement le nouveau Dylan. Maintenant, il fallait commencer à chercher le nouveau Dylan qui pourrait aussi assurer le rôle de nouveau Springsteen, au cas où. Et tombent sur le poupon Steve Forbert, genre de look à la Tony Joe White avant sa puberté, capable d'écrire des chansons sonnant comme du Springsteen de l'époque de Greetings from Ashbury Park, tout en ayant un phrasé Dylanien, au cas où.

Qui plus est, on délègue la production à John Simon, l'homme qui a sculpté le son des meilleurs albums de The Band, on enregistre live à Nashville (comme Blonde on Blonde), on mixe à New York (comme Born To Run) et on se dit que l'affaire est faite. Et on ne s'occupe pas de ce qui se passe au CBGB's et ailleurs, après tout Fleetwood Mac vend toujours des millions de disques malgré tout et au moins ce jeune homme ne semble pas se droguer. Et on n'écoute pas le vent des Clash qui revient d'Angleterre (London Calling), et on foire tout le projet.

On foire tout, sauf la musique, sublime. Sans grande originalité, mais sublime, même si les faux pas ridicules (l'espèce de reggae de Complications, n'importe quoi...) plombent par instants la galette. Romeo's Tune, par contre, rien que celle-là, mérite l'écoute de l'album. Et la production est superbe, et aurait pu en montrer à un Springsteen se masturbant la Telecaster pendant trois ans pour sortir un album. Toujours est-il qu'à l'époque, Springsteen n'était pas prêt à lâcher l'affaire et était bien assez grand pour pousser le classic rock ricain dans ses retranchements (The River, Nebraska), que Dylan finissait de saper le moral de ses troupes (avant de draguer une nouvelle jeunesse bien plus tard) et que donc le bilan comptable fut terrible pour le pauvre Steve Forbert. L'homme continue d'assurer les kermesses, après une floppée d'albums passés inaperçus, mais c'est tout. Pour la petite histoire, il paraît que c'est lui qui jouait le boyfriend de Cindy Lauper dans le clip de Girls Just Want To Have Fun. Génial. Ah non, soyons honnêtes ! de grands (?) noms reprendront ses chansons. Débrouille-toi avec la petite monnaie que ton statut d'auteur-compositeur te laisse, c'est moi qui passe à la télé. Et, euh... comment dire, fais pas chier si je te pique les arrangements par la même occasion, hein (écoutez donc la version de Romeo's Tune d'un Keith Urban, à part un coup de banjo en plus en intro... ça pompe sec, mais en plus gras).

Reste cet album, quand même. Que je poste ici pour qu'on se rappelle de lui, des dégâts potentiels du music business et du talent qui parfois et même trop souvent, ne sert à rien.

Just say goodbye to little Jo...

1 commentaire:

  1. En tout cas ça donne envie d'écouter un disque que j'ai pris sur les conseils de je ne sais qui...
    Et Yes, pour le Garland Jeffreys ou bien je pensais à John Hiatt et Hop je place un que j'admire presque autant que Costello, chainon manquant vers le Boss: Graham Parker (Quoiqu'il ai fait des Chef d’œuvre)

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