Voilà un album largement sous-estimé. Mais comment, à l'inverse, estimer à sa juste valeur le come-back osé (que des compos !) de Page & Plant après les magnificences originelles de Led Zeppelin, et surtout après l'album de retrouvailles semi-unplugged (No Quarter, présent chez Jimmy), défrichant des airs connus dans des arrangements royaux (l'immense version de Kashmir, rien que ça...).
Face au succès largement mérité de leurs premières vraies retrouvailles en 1995, faisant suite à des errements dont la décence nous interdira le rappel ici, Zozo et la Plume décident donc de remettre le couvert en 1998, pour un album ambitieux et aventureux (reprenant, certes un peu moins énergiquement, les choses là ou Physical Graffiti et Presence les avaient laissées). Four garanti, évidemment. Pas de remix de Stairway To Heaven, rien à quoi se raccrocher si ce n'est, pour les plus férus, cette envie de suivre les deux génies hors des sentiers battus, une fois encore, sait-on jamais ? Mais pour les autres... Avant l'ignoble In Through The Outdoor, Led Zeppelin s'était envolé vers des contrées difficiles, rigides et sans compromis. Et c'est là qu'on les retrouve.
Malgré une brève intro acoustique, Shining In My Light ne laisse aucun doute quant à ce qui va suivre. Rythmique tarabiscotée à la... on n'insistera pas, pauvre Bonzo... sertie de cordes arabisantes, et la gibson qui envoie le riff... Et le reste suit gentiment (When The World Is Young et son refrain doré aurait pu fonctionner en 1975...). Problème, Plant manque un peu de voix et Page, lassé de planter ses soli, se concentre sur des accordages tarabiscotés pour envoyer ses nappes venues d'ailleurs. Et ce ne sont pas les quelques loops (Most High, House Of Love) qui suffiront à assurer une quelconque modernité à l'album. Même si, encore, Most High... waouh... mais bon tant pis.
Face donc à un monde inconnu que les moins de 20 ans à l'époque n'avaient pas envie de connaître, et en retard sur leur temps, Page & Plant ratèrent le coche.
Et pourtant, encore une fois... Ecouté juste après Presence, l'imaginant sorti juste après, on tenait là un truc qui aurait pu les faire vivre un bout de temps encore... Sons Of Freedom, avec son petit côté Immigrant Song, aurait fait une excellente intro pour la tournée Led Zeppelin 1984. Qui aurait pu, à juste titre, toiser les autres stars du moment de haut et jouer à guichets fermés, comme d'hab'.
Ironie du sort, Plant reprendra Please Read The Letter avec Alison Krauss, sur son merveilleux Raising Sand qui connaitra le succès dix ans plus tard... Ten Years Gone... Tellement de succès que Plant refusera catégoriquement de partir en tournée après le concert de reformation de Led Zep à l'O2, parce que pris par des engagements avec la belle Alison... et on le comprend.
Que bref, voilà un bien bel album à redécouvrir, même si Robert Plant (déjà) baisse d'un ton et que Jimmy Page n'est génial que dans les parties rythmiques, encore une fois ses envolées en open-tuning ésotériques sont à re-estimer sur cet album. De même qu'une ambiance moite comme celle de Heart In Your Hand. Eux qui ont tenu les années 70 dans le creux de leurs mains, dictant la prochaine mode et imposant la marche à suivre jusqu'en 1977, les voilà ici complètement submergés par la vague electro qu'ils ne tentent que trop timidement de séduire par instants, via quelques bribes un peu world music (beurk, ce terme, quelle horreur). Leur éventuel avenir, proposé dans cet album courageux, ne saura pas intéresser grand monde. Dorian Gray rattrapé par l'image de son portrait, on connaît...
Oh, je ne prétends pas vous faire redécouvrir l'album du siècle, mais quand même. L'os, ici balancé, méritait d'être d'avantage rongé qu'il ne le fut à l'époque par les adeptes. Il y restait de la chair. Du sang, de la sueur, et beaucoup de larmes aussi, malheureusement ("Walking into Clarksdale, trying to keep my friends alive"... no comment).
Hi Jeepeedee :)
RépondreSupprimerJe vois qu'on en revient aux choses basiques et à la leçon de lecture après quelques moments d'égarements (pourcel et celui qui ont suivis,lol).
La chair est quand même par moment un peu flasque sur cet album qui, je n'en doute pas mérite d'être réécouté, merci donc de nous l'avoir proposé à ronger. C'est vrai que quand les temps sont durs, l'aide z'est plein de bonheur!
Amitiés!
Lyc
@Lyc : je ne sais pas si la chair était flasque ou si la flasque était chère... mais je l'aime vraiment bien ce disque. Dans sa tentative désuète de renouer avec le Grand Passé. A propos, bravo pour ton commentaire sur la compile du Zim. Me tente pas, sinon je poste ses bootlegs pendant six mois (en sélectionnant rudement parmi les quelques 600 qui dorment dans mon antre). Je vais essayer d'en trouver un ou deux gratinés histoire de te donner raison.
RépondreSupprimerPareil que Jimmy, surtout que j'étais resté sur leur retrouvailles avec effectivement ce Kashmir.
RépondreSupprimermais reste qu'ils entrent dans mon panthéon des amoureux de la musique, des missionnaires (Comme Richard Thompson au hasard) et pas évident pour des millionnaires.
Même si 30 ans après, nos idoles ne peuvent nous resservir les mêmes ingrédients dans les mêmes recettes (après tout, passé un certain âge, les chanteurs (euses) d'opéra ont aussi ce genre de problème), ce disque scella de fameuses retrouvailles et reste une sacrée référence.
RépondreSupprimerFan absolu de Led Zep, je le trouve bien plus intéressant que le concert de l'O2.
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RépondreSupprimerMerci à tous pour vos commentaires, même si certains sont dubitatifs. psegpp, quand même, est du même avis que moi, j'aurai au moins fait plaisir à quelqu'un...
RépondreSupprimerJ'avais bien aimé cet album même s'il me faisait une impression du genre "les héros sont fatigués". Mais c'était peut-être ça que j'aimais, la fragilité de ces deux Dieux du rock.
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