Encore un peu de ping-pong avec l'ami devant, qui a accédé à mon rêve le plus fou : me fournir la compilation des originaux interprétés par Joe Dassin, compilation qui rend un hommage singulier à l'homme au strabisme ravageur et au costume blanc de nos franchouillardes années télé. C'est une merveille, qui s'écoute sans embrouilles (à part quelques spaghettis ritals peu digestes) même si l'on ne vénère pas Joe avec dévouement, ce qui me laisse sans voix et triste comme une soupe sans moustaches, mais que je peux malheureusement comprendre.
OK, avec Il Etait Une Fois, ça fait deux écarts presque d'affilée, mais l'émotion m'étreint, j'ai pas pu faire autrement que de poster un Joe. Me suis retrouvé devant l'intégrale avec cette grave question : Lequel ? Sache que tu ne peux raisonnablement pas gonfler les quelques personnes qui suivent ton blog avec une quinzaine de posts, choisis bien...
Alors j'ai choisi son dernier album. Pas le meilleur, mais le plus émouvant. Un copain martiniquais m'avait raconté, il y a longtemps, avoir vu Joe Dassin affalé au bord de la piscine d'un hôtel, là-bas aux Antilles, complètement cramé, qui lui aurait raconté qu'il en avait marre de faire de la merde, que tout ce business le gonflait. Anecdote véridique ? il me plaît de le croire. Fan de folk, country blues et variétoche US de qualité, Joe a définitivement dévié vers les sirènes du Hit-Parade glauque après l'Eté Indien, tube improbable alors qu'il était au creux de la vague malgré un album riche en références bien senties . D'une sorte de Lee Hazlewood francophone, il est passé au statut d'interprète de slow libidineux italiens pour ménagère de plus de 30 ans, parce qu'il était là, le pognon, en 1975.
Jusqu'à cet album, Blue Country, son dernier. Joe avait décidé de claquer la porte et de (re) faire ce qu'il aimait. S'est payé Tony Joe White en session man de luxe (quand même !), a enregistré une bonne huitaine de ses titres, une reprise de Clapton, une de Jim Croce, et une compo à lui, Le Marché Aux Puces. Et avait décidé que c'en était fini de la bouse et des ritals, qu'il poursuivrait sur ce chemin. Suicidaire commercialement, mais salvateur. Il fut donc assassiné par le FBI, la CIA et le KGB qui ne l'entendaient pas de cette oreille, comme Jim Morrison, comme Amy Whinehouse, comme John Lennon et tant d'autres : l'étude de marché était sans appel. L'artiste qui pète un câble et qui ne sortira plus rien de rentable rapportera plus mort que de son vivant. Une soi-disant crise cardiaque aura donc raison du bonhomme, et de ses velléités à revenir à ce qui avait fait le charme de ses débuts.
Sauf que... c'est Tony Joe White lui-même qui reprendra Le Marché Aux Puces à son compte pour transformer la triste ballade en l'immense The Guitar Don't Lie (que notre Johnny Sanshyday national reprendra sous le titre de La Guitare Fait Mal - c'est sûr, Jean-Philippe, si tu t'y prends comme un manche...). C'est l'ultime hommage que le pauvre Joe aura connu de son vivant : repris par son idole, mais qui ne se ferait pas pipi dessus à l'idée d'entendre sa chansonnette magnifiée ainsi ? Et même, la version française ici présente me tord les boyaux avec son texte doux-amer sur les effets que le temps affecte à toute histoire d'amour. C'est moins brutal que Manset, mais c'est pas tout à fait faux, malheureusement.
Alors, comme disait George Michael, listen without prejudice... La voix de Dassin est certes un peu plus veloutée, ma louloute, que celle de Tony Joe, mais ça le fait. Tout n'est pas inoubliable, mais, au hasard, La Saison Du Blues (The Change) vaut son pesant d'alligators façon Chalet Brandt, et le Joe ne s'en sort pas si mal, voir pas mal du tout, avec sa version de Polk Salad Annie.
Désolé pour ceux qui attendaient l'Yves Simon du dimanche soir, et méditez dans votre déception bien compréhensible que la frontière entre la variété et la chanson française de qualité validée comme telle par je-ne-sais-quelle instance est parfois ténue, et que, comme pour Victor Hugo, parfois se cache un diamant dans un sac de cailloux. Merci mille fois à devant, once again, c'est trop beau ce cadeau, et faites péter les watts. Joe Rules !!!
Faut pas faire de la peine à John...
Joe Dassin, surnommé l'attachiant par ses proches, la bande à Jojo chez les Carpentier, son décès dans un resto à Papeete, sa tombe au states, anonyme parmi les anonymes, sa Marie Jeanne et son pont de la garonne, il en laisse des souvenirs quand même derrière lui.
RépondreSupprimerMerci pour le partage
Je te le fais pas dire, Anonyme. Content que ça t'ait plu.
RépondreSupprimerC'était une vrai bulle de champagen. ;-)
RépondreSupprimerBravo pour cet article !
RépondreSupprimerJoe Dassin et Tony Joe White : une collaboration musicalement réussie. J'adore cet album country blues. La voix de Joe s'ajuste merveilleusement bien sur la musique de Tony Joe.
Infos pour les fans :
- Tony Joe White est en tournée cette année en France ;-)
- Joe Dassin (mon musicien Folk français préféré) a adapté beaucoup de chansons, sorties des + grands comme Clapton, Marley, Wonder, Diamond, Simon & Garfunkel, The Doors.... ses chansons ont d'ailleurs connu beaucoup + de succès que leurs versions originales. Normal ! C'est Joe Dassin :-)
Pour + d'infos, c'est par là : http://discographiejoedassin.blogspot.com
Merci pour le partage,