Thème du jour : Ah que quand jeudi jeudi ! Johnny Hallyday obligatoire
On me rétorquera : c'est le talent, coco. Je n'en doute pas. Et même si j'en doutais, je me dirais que si autant de gens leur ont trouvé du talent, c'est qu'ils devaient bien en avoir. Mais alors, Taxi Girl, Asphalt Jungle, Starshooter, tous les autres, n'en avaient donc que si peu ? Qu'est-ce donc que le talent ?
Tiens, pourquoi Johnny Hallyday (puisque c'est le thème du jour) a-t-il survécu à tout ça, alors qu'un Ronnie Bird a disparu de la circulation dans l'indifférence générale ? Prétendus Yé-Yés tous les deux, Salut Les Copains et tout ça. Même l'explosion d'un Joe Dassin sur les Champs-Elysées bien avant Al-Qaida, pourquoi ?
Et je crois que j'ai compris. Que je détiens la Formule Secrète. Qui devrait fonctionner pour tous les petits groupes qui débutent. Envoyez-moi un virement de 17,50 euros via Paypal et je vous dirai.
Naan, je blague. Je vais vous le dire gratos. Les Français n'aiment pas les Anglais. Tout au plus supportent-ils les Beatles. Ou les Stones. Mais même les Stones ont cherché à jouer aux américains. Y'a qu'à écouter l'accent de Jagger dans les années 1970, non ? Mais ils n'aiment pas qu'un artiste dit francophone manifeste son influence soo British. Dead. Out. Au suivant. Téléphone s'est lancé avec Hygiaphone, sorte de Johnny B. Goode à la parisienne, Noir Désir a toujours été influencé par le Gun Club et autres loosers US. Du producteur au consommateur. Les anglais aussi, me direz-vous, ont été influencés par le rock'n'roll originel, les bluesmen. Oui mais ils y ont rajouté leur British Touch. Si, derrière, nous rajoutons une French Touch à un plat déjà typé sauce à la menthe, ça ne peut plus fonctionner.
Si l'on regarde (ou mieux, si l'on écoute) ce que Johnny a fait, de ses débuts jusqu'en 1969, qu'y trouve-t-on ? Essentiellement une influence, des reprises US. Toujours back to the roots, le Johnny. Il y a bien une reprise des Beatles qui traîne par-ci par-là, mais elle n'a jamais marqué les esprits (Je Veux Te Graver Dans Ma Vie, Je l'Aime...). Il y a bien du Charles Aznavour (Retiens La Nuit) ou du Hugues Aufray (Le Pénitencier, mais via The House Of The Rising Sun, CQFD), mais on ne peut pas dire de ces derniers qu'ils aient été influencés par le British Boom, si ? Tute la musiqueuh que j'aimeuh, eeellle vient de là elle vient du bluuuze. Sécu et fédé.
Chose incroyable, aussi, Johnny n'a pas été influencé le moins du monde par Dylan. C'est bête à dire, mais même chez un Jean-Jacques Goldman on retrouve des citations (sur la Highway 61 l'ombre d'un Zimmerman, dans je ne sais plus quel titre), des tics, un phrasé. Là encore, british quasi peanuts.
Je vous le dis, moi, talentueux musiciens de Brie-Comte-Robert ! Avalez votre Chuck Berry quotidien, fuyez la perfide Albion et les portes de Paris vous seront ouvertes !
Cela avait tellement bien fonctionné pour Johnny, qu'un jour de 1969, sentant la décennie suivante incertaine, il s'en vint en conquérant s'offrir les services des plus plus perfides brittons, prêts à pactiser avec ce descendant de Guillaume Le Conquérant pour quelques livres Sterling. Sans doute un Jimmy Page n'y était pas pour rien, ayant déjà cachetonné pour le frenchy. Au hasard d'une séance, à la fin de A Tout Casser, on l'entend gratouiller un truc qui deviendra le riff de Whole Lotta Love.
Sauf que Johnny, là, aidé d'un Mick Jones citoyen des Etats-Unis d'Amérique, met les rosbeef au pas. Les cravache, les dompte, les laisse galoper bien plus loin et plus fort que sur leurs propres productions. C'est un Steve Marriott, un Ronnie Lane (quand même), un Jimmy Page (pour la dernière fois), un Peter Frampton littéralement free qui cavalcadent derrière le Johnny. Qu'avaient-ils à perdre ? This guy wants us to play loud, let's do it that way and see what happens ! Qu'est-ce qu'ils disent ? Rien, Johnny, t'occupe, chante, chante.
Ce fut une des plus belles batailles que la France remporta contre son ennemi héréditaire. Ce qu'on entend là est plus fort que ce qui se faisait de l'autre côté du Channel. Et c'est, peut-être, la seule fois, où Johnny a été un poil en avance sur son temps. Il a bien souvent collé aux fesses des nouvelles modes, de très près parfois (et Dieu sait que ça ne devait pas sentir bon, quand sur l'album suivant il renifla Joe Cocker) mais ne les a jamais devancées. Là, si. C'est du lourd. Je conseille même aux plus allergiques d'écouter juste les intros des morceaux. Une tuerie. Evidemment, dès que Johnny chante, cette même envie d'être serbo-croate et de ne rien comprendre à ce qu'il dit me revient. Jusqu'au final, ah que ridicule ah ouais (mais il faut tenir jusqu'à la dix-neuvième seconde de la quatrième minute de son Je Suis Né Dans La Rue pour le savourer, ce qui n'est pas donné à tout le monde, mais rien n'est donné dans ce bas-monde).
Qu'importe. Ah que cet album que je l'aime, c'est grâce à lui que j'ai découvert le rock, pas très roll car bien trop métallique, trop lourd, heavy metal, quoi. Saisi par la pochette, surpris et perplexe par le magma sonore (je connaissais Le Pénitencier et sa daube variétoche, Derrière l'Amuur et autres ritaleries indigestes) comme tous les gamins de mon quartier), ça m'a permis d'accéder à tout le reste. Et j'en connais des palanquées pour qui c'est pareil. Des millions qui n'ont pas pu aller plus loin, aussi. Rien que pour ça, il m'est très difficile de mépriser ses sorties ridicules, son accointance avec l'UMP, et tout ce qu'on pourrait trouver de pitoyable chez lui.
Grâce à cet album, j'ai même appris à apprécier le rock anglais.
Honni soit qui mal y pense.
Rappel des participants :
Jimmy Jimmereeno du mirifique Club Des Mangeurs De Disques
Jeepeedee du superbe Jeepeedee's Rips
Charlu des délicieuses Chroniques De Charlu
La Rouge de la magnifique Chambre Rouge (qui n'est pas certaine de pouvoir assurer, mais qui nous soutiendra quoiqu'il arrive)
Warfleloup du formidable Warfleloup's Blog
MaN de l'excellent Manifesto
Marius Perlinpimpin du génial Canut Brains (Qui n'est pas certain de pouvoir assurer toute la semaine, mais qui tenait absolument à débuter avec nous tous.)
Devantf (Antoine) de l'extraordinaire Get Happy !!!
Mister Moods de la divine Caverne D'Ali Baba
Toorsch du somptueux Grenier Du Rock
http://legrenierdurock.blogspot.com
Le sensationnel Pascal Arcade (Dont je ne sais pas encore d'où il postera.)
Le phénoménal Everett W. Gilles (Qui postera dans les commentaires du Club.)
Zer du dantesque Church Of Zer
Les français ne sont pas rock, le rock français n'existe pas, c'est un mythe.
RépondreSupprimerJohnny n'est pas un rocker, Eddy non plus, et Dick est tout juste un représentant en moumoutes.
Le rock français c'est avec de l'accordéon (parce que ça sonne plus français même si ça nous vient d'immigrés italiens).
Gérard Blanchard's not dead !
Bien vu Jeepeedee. Celui ci était dans ma Johnny very short list mais je ne l'avais pas trouvé. Je prends bien sûr.
RépondreSupprimerJuste en passant, Johnny a repris en 74, Honky Tonk Woman.
Je me suis encore bien marré avec ta chronique. Et puis il y a matière à débat et entre gens civilisés on devrait s'en sortir. On peut je pense évoquer l'influence primordiale des groupes anglais (Stones, Animals, Yardbirds pour ne citer qu'eux) sur le public américain mid sixties qui a redécouvert ses propres origines musicales, le blues et ses plus majestueux représentant (Muddy, Howlin' Hooker bref tout plein ...) Pas de Seeds, pas de Shadows of Knight etc sans les british. Bon ok il y a eu les Byrds et Dylan.
Je pourrai te dire que c'est grâce à l'album Rock n roll de John Lennon que j'ai appris a aimer le rock américain. Bon voilà c'est juste une réflexion sur les sujets que tu abordes avec talent dans ton billet.
ENcore merci pour ce Johnny là.
Bonne journée
Johnny a réussi parce qu'il avait le même imprésario que Mireille Matthieu, voilà tout.
RépondreSupprimerLa chanson-titre est celle que je préfère de toute la discographie du bonhomme, je prends, et je vire le reste.
Et je m'en souviendrai s'il faut voter !
EWG
Si si Les français avaient quelques vrais... Je pense à Dutronc ou Nino Ferrer. Influence Britpop ou Soul mais pas honteux pour cette même période.
RépondreSupprimerVous êtes tous à évoquer des live par ci par là... Va me falloir m'y pencher... En choisir un, parce que UN Johnny ça va, c'est quand il y en a ... Mais vous savez la suite
Une tuerie..c'est exactement ça.. pas le disque qu'on met en avant..et pourtant, il s'est sali un maximum (sa tronche d'écolier qq années auparavant), colle à l'époque.. une bombe 70's avant l'heure, un brûlot .. avec des parôles pas trop con con ..encore.
RépondreSupprimerEt puis 69 .... du cru que du cru.
Encore un post d'anthologie (magnifique demonstration qui sauve ( un peu ! ) l'écoute du rocker ????? national .....mais rien à faire...je n'y arriverai pas....40 ans que j'essaie pourtant!
RépondreSupprimerBon ceci dit c'est quand même ta prose d'hier mercredi qui restera à vie dans la blogosphére...il ne t'es jamais venu des idées d'écriture de nouvelles ou autres ???
Superbe
Bon, au risque de me répéter souvent sur les blogs amis du concours, Joni, j'peux pas.
RépondreSupprimerReconnaitre qu'il était toujours entouré des meilleurs du moment, ça c'est certain.
Seulement, voilà, sur un album comme celui-ci, tout est bon, mais Joni n'y est pour rien.
Pour rien du tout.
A part la boite à fric assuré.
Bon, je reconnais ses talents vocaux. Surtout à cette époque.
Autrement, très bonne présentation. Mais c'est une habitude.
MaN
Vu que tout le monde a l'air d'en dire du bien, je vais devoir tenter l'expérience...
RépondreSupprimerLa pochette m'a bien fait rire, c'est déjà ça !
Je suis complétement sur la ligne de Manifesto.
RépondreSupprimerÇa sonne, mais ça sonne creux.
Monsieurj
Voilà t'y pas que Jimmy s'énerve ?
RépondreSupprimerLe Rock français existe, je suis d'accord avec toi.
MaN
Un petit coucou, aime bien ta plume encore une fois. Intéressante conclusion. J'aimerais en rajouter plus mais pour Johnny j'ai pas de mot donc... pouet! Mais je pense qu'il aurait bien gagné au concours Movember avec sa moustache pour le cancer de la prostate. C'est ce qui me viens. Bonne journée à tous. Vive le pouwel!
RépondreSupprimerMerci à tous pour vos commentaires. Concernant Johnny, je suis un peu d'accord avec tout le monde. Je m'explique, voilà un gars qu'il est difficile d'adorer inconditionnellement, mais tout aussi difficile à détester. Comme dit, pour moi il a été un passeur, il a signifié quelque chose. Je ne peux, raisonnablement pas le descendre en flamme pour son côté euh... bref, on est tous d'accord. Ce mec là aide de pauvres gens à vivre, à les faire rêver. Ca je respecte par desssus tout.
RépondreSupprimer@Everett : ben si tu t'es fait plaisir avec une chanson, c'est bien déjà. Va voir la compile à Jimmy, elle ratisse plus large, et je serais pas étonné qu'il y en ait 2-3 qui te conviennent.
Bon, allez ;
@Mr Moods : Pas d'accord, faut pas exagérer. Entre un Noir Désir habité et un Coldplay surgelé, mon choix est vite fait.
@Jimmy : désolé, je l'ai pas celui-là. Au risque de vous choquer, celui que j'ai posté (et quelques autres de la période 69-75, en gros), je les ai en CD. Eh ouiais ! Et j'assume. J'adore la richesse des arrangements, et je prends ma méthode de serbo-croate dès qu'il chante, comme dit dans le post.
@LRRooster : complètement, mais alors complètement d'accord avec toi. Y'a eu une sorte d'alller-retour assez intéressante, entre l'Angleterre et les USA. Effectivement, j'ai oublié sa reprise de Honky Tonk Woman, sur Rock'n'Slow. Au risque d'en rajouter, et à peu près à la même époque, mon papa m'avait acheté la cassette. C'est comme ça que j'ai découvert les Stones. Un passeur, ce Johnny...
@charlu : tu prêches à un convaincu...
@anonyme : si, j'ai essayé d'écrire des nouvelles, j'en ai en stock. Mais ce qui me plait, c'est les chroniques de disques, barrées de préférence. Dont acte (et facile avec un Zappa). Merci pour tes compliments qui me vont droit au coeur.
@maNIfesto : je comprends tout à fait, no problem. On peut très bien vivre sans Johnny, ça m'arrive 363 jours par an en moyenne.
@Mr Moods 2 : un disque qui fait rire procure une émotion aussi jouissive qu'un quatuor à cordes de Vivaldi ou autres. Y'a pas de honte à se faire du bien.
@Jimmy : Je te suis d'autant plus que j'ai moi-même usé de la méchanceté par pure conviction personnelle, et que ça n'amène rien de bon. Les coups et les douleurs, ça se discute pas.
@Monsieurj : Ca sonne creux ? Bon, ben ça sonne quand même...
@maNIfesto : j'y crois aussi.
@La Rouge : merci... faudra lui passer le mot, à Johnny, il paraît qu'il a des problèmes de sous.
Jeepeedee,
RépondreSupprimerun bouquin genre " Rock, Pop : un itineraire bis ( ou "ter" puisque le bis est déja pris!)en X albums essentiels avec tes chroniques ( bien "barrées" comme tu dis ) j'en rève et je ne pense pas être le seul !....Vivement demain pour le(s) prochain(s) post's) ( je me régale aussi avec certains de tes collégues) .....et encore les jours suivants.......un petit jeu qui durerait jusqu'au post 99 999.....
Je vais m'endormir avec un peu de Nino Ferrer; le concert chez Harry , mon préféré
A+
manset72
"Mr. Moods a dit…
RépondreSupprimerLes français ne sont pas rock, le rock français n'existe pas, c'est un mythe."
Allez quoi, Indochine c'est du loooooourd !!!