J'ai acheté des CD depuis 1986 (et plein de vinyles avant), j'y ai mis énormément d'argent. J'en ai souvent racheté (remasterisations, bonus tracks...) et aujourd'hui tout ça ne vaut plus rien. Les rayons se vident au profit des DVD, des blu-ray disc (tout pour les yeux, rien pour les oreilles), en attendant le prochain format.

Et pourtant... c'était pas beau tout ça ?


- - - Disapproved by the Central Scrutinizer - - -

samedi 22 mars 2014

GCDBMDD #7 : The Doors "LA Woman"

Thème du jour : I want to drive you through the night, down the hills - Vous mettez cet album dans l'autoradio et vous conduisez toute la nuit. Pour aller où? Là n'est pas la question...

La short-list incluait également, et pour les mêmes raisons que ci-dessous, Electric Ladyland de Jimi Hendrix, que j'avais songé aussi à placer comme disque de cul magistral. J'avais songé égalment au Doggystyle de Snoop Doggy Dogg, là encore, du vécu, mais vu l'épisode disco, j'imaginais d'ici les salves de commentaires sur le gangsta rap, le fric, la dope et le reste. De toute façon, mon honnêteté m'impose de vous parler du LA Woman des Doors.

Ce qui n'est pas une chose facile, car tout a déjà été dit, car je ne me permettrai pas de relancer le débat sur la qualité de l'album (le meilleur des Doors ? A votre avis ? hi hi hi...). Inutile me semble-t-il de passer 3 heures à le ripper en mp3, vous l'avez déjà, non ? Et l'édition deluxe n'apporte rien, voire enlève de la magie à ce bijou, alors...

Disons que ce disque, acheté en version originale à un pote contre 5 malheureux francs de l'époque qui finirent en carambars, dont la moitié me fut rétrocédée, fut une découverte totale. La voix de Jim Morrison, d'abord, preque crooner, ce qui fut pour me déplaire car je préférais les brailleurs qui semblaient porter d'avantage de révolte que le mojo risin' Jim dans, au hasard, Hyacinth House, voire dans Love Her Madly. Bien sûr, j'adorais Riders On The Storm. Je n'ai jamais pu, depuis, me défaire de ces frissons qui me traversent l'échine dès qu'apparaît un petit filet de Fender Rhodes dans n'importe quelle chanson.

Mais tout cela importe peu.

Comme chaque année, avec mon papa et ma maman nous partions 15 jours en vacances au camping de la Pascalinette à la Londe-les-Maures. Je passai donc de mon enfermement alsatique déprimant à la beaufitude complète de la toile de tente sous les pins parasols. On allait manger 2-3 fois à la Trappa, une merveilleuse pizzeria à Hyères-les-Palmiers. Les autres jours, on allait se baigner à la plage, et mon cousin Patrice nous rejoignait le soir, dans sa R12. Mes parents buvaient du pastis et du rosé avec lui, ils avaient l'air de s'amuser de plus en plus au fil de la soirée, et mon ennui était inversement proportionnel à leur pochetronnerie, puisque c'est bien de cela qu'il s'agit.

Heureusement, si ma vie naviguait entre ces deux points d'ennui magistral, la maison et le camping l'été, il y avait ces 900 km qui séparaient mes deux cachots, et il fallait bien compter 12 heures de Mehari pour joindre les deux bouts. 12 heures absolument magiques, durant lesquelles les paysages défilaient, durant lesquelles il pouvait, potentiellement, se passer quelque chose.

J'avais mon walkman vissé sur la tête, et j'embarquais mes maigres trésors de l'époque : Goat's Head Soup des Stones, le Led Zeppelin IV, Electric Ladyland de Jimi Hendrix et - justement, cette année-là - LA Woman des Doors. Stairway To Heaven gardera toujours l'odeur de la toile de tente et de la sueur lors de la sieste obligatoire après le pastis et le rosé, Dancing with Mr D. celui des Choco BN, de même que All Along The Watchtower.

LA Woman, le disque et la chanson en particulier, c'était autre chose. On avait voyagé de nuit, et mon père avait fait une petite sieste sur le coup des 3 heures du matin sur une aire d'autoroute. Je ne dormais pas, j'écoutais LA Woman en regardant les allez et venues incessantes des voitures sur le parking de la station-service, les phares qui déchiraient la nuit sur l'autoroute d'à côté. J'étais réveillé. En pleine nuit. J'entendais les voix des portugais, dans leur R16 surchargée, qui repartaient au pays. Parfois, des anglais discutaient (des anglais ! comme les Stones ! yeah !) et je m'imaginais un jour, moi aussi, rouler comme ça la nuit vers d'autres destinations. Ah oui, putain, d'autres destinations. J'étais en Amérique, je devais atteindre Los Angeles au petit matin, dans ma Cadillac. J'étais avec Isabelle, mon impossible amour de l'époque, et on avait plein de cassettes à passer dans l'auto-radio ! Le Some Girls des Stones que j'avais pas pu me payer, les disques de ce Bruce Springsteen dont on parlait tant mais que je ne connaissais pas, et on ferait cette même sieste en écoutant le Floyd...

The cars hiss by my window...

Même ce morceau chiant, là, abruti par la fatigue à 3 heures du mat', il m'allait très bien.

Mais c'est surtout LA Woman que j'ai découvert. J'ai eu l'illumination. Ce passage lent, là, quand Morrison se met à scander Mr Mojo Risin, toujours ce Rhodes derrière, et les bagnoles qui défilaient... Ridin' on the freeway, city at night... Jamais, pour moi, on a mieux écrit et chanté ces moments glauques mais tellement poétiques, symbolisés par cette aire d'autoroute. Oh, ce n'étaient pas les lumières de la ville, et le côté ride, avec mon papa dans sa Mehari, était quelque peu... limité ?

Alors oui, définitivement, imaginant que je roule dans la nuit, et peu importe vers où, mais avec quelqu'un que j'imagine forcément quelqu'une, c'est certain que LA Woman tournerait en boucle sur l'auto-radio.

Je n'ai, à ce jour, et comme la Lucy Jordan de Marianne Faithfull, jamais conduit de belle bagnole, qui plus est jamais sur une freeway aux States.

Sans doute est-ce un rêve qui ne se réalisera jamais. Alors, il me reste LA Woman et ces images définitivement imprégnées dans ma tête et dans mon âme pour arriver à vivre avec.

vendredi 21 mars 2014

Rebellion !

Hello !

Dans ces périodes d'élection, donc avant même la fin du précédent jeu, je vous en propose un nouveau : Le Grand Jeu des Petits Disques Mangeurs de Bloggeurs !

Autrement dit, même veine, mêmes thèmes à venir, mais je ne veux voir venir que des quarante-cinq tours, des Singles, des Singlés donc. Youtube autorisé officiellement dans le règlement déposé chez un huissier hier soir.

Ca vous dit ? Mais va falloir gloser sur la face B les copains ?!!

On se fait une réunion, chacun amène une salade et un réfugié Chilien et on voit ?

Bises !


GCDBMDD #6 : The Who vs John Martyn "Live At Leeds"

Thème du jour : It's just a reflektor - Deux pochettes d'albums qui se ressemblent comme deux gouttes d'eau. Coïncidence?...

Bon, complètement à la bourre, pour raisons professionnelles là encore. Je joue petit. J'aurais pu également parler des 50 000 000 Fans can't be Wrong d'Elvis et du 50 Fans can't be Wrong de Phil Ochs. Mais c'était carrément la déprime.

Là, on tient deux disques formidables (rythm'n'blues ?). Les Who envoient la sauce, durcissent le ton pour résister au hard blues de Cream et du Led Zeppelin à venir (à grands pas). Se lâchent de leur Tommy gargantuesque pour frapper juste. Rappeler que ça dépote. Young Man Blues, la voie est grande ouverte vers Black Dog. Et l'idée géniale du live, non pas un double-album mais un simple. On reprend juste les morceaux quand on est chauds, on éclate la tête du mod-consommateur avec de la pure folie. Sans hésiter, dans sa version originale, et non double-deluxe expanded machin, le meilleur live de tous les temps.




Quelques années plus tard, le fo-folkeux John Martyn, qui a bien plus de choses à picker que Marcel Dadi se retrouve en ces lieux, et la magie opère encore. Bourré comme un coing, donc rock'n'roll autant qu'on peut imaginer que les Who l'ont étés quelques printemps auparavant, mais dans un registre n'ayant rien à voir, le John démontre aux étudiants attardés que peu importe le vin, pourvu qu'on ait l'ivresse. Blagues salaces en début d'album, on sent la pinte à la bière, émouvant dès qu'il touche sa guitare, c'est ici le temps de la lévitation. Solid Air. Et sans doute aussi de l'ironie dans la pochette et le concept. Ces jours-là, et suite à ces deux albums, Rock & Folk a bien mérité son nom.


mardi 18 mars 2014

GCDBMDD #5 : Donna Summer "Love To Love You Baby"

Thème du jour : Let's Get It On - Le disque qui donne envie de jouer des hanches... et pas pour danser

Hé les mecs ! La réponse est dans l'intitulé, non ? Evidemment qu'il n'y a pas mieux que le Let's Get It On de Marvin Gaye ! Spécialement étudié pour ça, parfaitement fonctionnel, bref, on fait quoi maintenant ? Non, non, ça m'agace, là !

En plus, je suis dans un hôtel à Dijon pour la semaine, wifi ténébreux, bref, impossible d'envisager le post d'un album, va falloir vous contenter d'un lien youtube, désolé. Mais comme je suis pas le seul, j'ai moins de scrupules. Tout fout l'camp mon bon monsieur.

Bon, ça y est, je suis calmé. Enfin, un peu. D'abord, pour la bagatelle, désolé, la musique n'est pas l'ingrédient premier. Moi je veux bien faire valser Madeleine Peyroux sur des airs tyroliens si ça lui chante, ou écouter des poèmes de Ginsberg avec Patti Smith, ça ne me dérange absolument pas. Mais bon, puisqu'il faut s'y coller, allons-y sans hésitation.

Vous vous rappelez du Club Dial ? 3 disques pour 9,99 Fr chacun, plus les frais de port, plus l'engagement d'un an, etc. etc. ? Ben moi, du haut de mes dix ans, j'avais commandé Oxygène de Jean-Michel Jarre (j'aurais dû garder le vinyle, ça doit être collecter aujourd'hui...), Derrière L'Amour de Johnny et... Love To Love You Baby de Donna Summer. Et mazette, je dois bien dire que la pochette du Johnny servait à cacher celle du Donna Summer quand ma maman faisait irruption dans la chambre, Donna Summer dont je cachais le disque dans la pochette d'Oxygène pendant que je reluquais la pochette. Sulfureux, le truc. Le tout, je veux dire. Ah ces premières démangeaisons étranges, accompagnées par les râles de la Donna, que d'émotions. Certes, la bagatelle fut solitaire autant que surprenante, que voulez-vous, je n'avais jamais vécu tel émoi avec le catalogue Manufrance.

Et puis bien vite, le rock prit le dessus, le disco fut jugé ringardissime le temps que l'on passe de Saturday Night Fever à Grease, et ce fut tout.

Pourtant, quand je re-écoute le morceaux, je me dis qu'il y avait dans le disco des débuts quelque chose de quand même incroyable. Ralentir le tempo, mais ça, Marvin l'avait déjà compris. Non. Mieux que ça. La première vraie rencontre de la musique noire américaine avec la culture blanche européenne. Giorgio meets Donna. Réfléchissez un peu : le blues et la country, du moins ce qui fut commercialisé, se sont ignorés dédaigneusement. Le rock'n'roll et le rythm'n'blues, si l'on excepte l'écurie Stax, aussi, tout pareil. Côté jazz, les blancs-becs, aussi doués furent-ils, n'ont jamais fait qu'apprendre de Coltrane, Ellington et les autres. Le rock ? Combien de Jimi Hendrix ?

Alors pourquoi ? Je n'en sais trop rien. J'imagine que cette nouvelle musique lascive, dans les milieux homo new-yorkais avait trouvé un écho particulier puisqu'à cette époque, on était bien loin d'un mariage pour tous et qu'un pédé blanc ne valait guère mieux qu'un nègre ? Peut-être. On était à deux doigts d'une belle révolution musicale, mais rapidement le soufflé retomba. Le genre fut parodié des deux côtés, car l'évidence même de son efficacité (notamment pour le thème qui nous occupe) le transforma vite en monnaie sonnante et trébuchante. Les noirs reprirent Knock On Wood à la sauce discoïde, les blancs firent de même avec Don't Let Me Be Misunderstood. Tout devint disco. Même Claude François. Même les Bee Gees. Oh, certes, il faudra des dizaines d'années pour que la french touch tire ses marrons (pardon) du feu, mais quand même.

Le disco aurait dû réussir cette révolution que les sixties nous promettait. Aurait pu. Il lui manquait sans doute ce côté foncièrement rebelle qui fit qu'on put le plumer à l'envi, même si rebelle il était, mais pas dans le discours. Re-écoutez Love To Love You Baby, c'est le même message que le flouer power, mais insidieux, underground, ça ne vise pas à changer la société, uniquement à prendre son pied n'importe où, n'importe comment. Oserais-je dire, dans n'importe quel sens. Juste pour le plaisir interdit de l'instant. No future. Pour caricaturer, là où le punk disait non à tout, le disco disait oui. M'étonne qu'on t'ait discoïsé jusqu'à Sheila. Munich meets the Bronx. Une histoire incroyable quand même !

Et puis, hosanna au plus haut des cieux, un Giorgio Moroder, et toute la scène Acid de Chicago à suivre t'a même fait groover des Minimoog ! Dehors, les Yes et Genesis, ENFIN ! Et bon dieu, je reste persuadé que c'est bien plus grâce au disco qu'au punk, sur ce coup-là. Cette vieille loque de Steve Howe a même fini par jouer avec Frankie Goes To Hollywood. Gnarf !

Alors bien sûr, le bon dieu qui n'a aucun sens du groove a puni ce petit peuple avec l'arrivée du SIDA, et Donna Summer s'est repentie. On sait tout ça aussi. On ne fait que vivre des révolutions avortées, mais bons, certains tendent à dire que la baronnie a survécu à la Révolution Française, alors, on va pas faire le couplet du c'était mieux avant, ça a toujours été un peu pareil. A part le club des 27, nous devenons tous gros, assagis et sarcastiques.

Peut-être, un peu, parce que le disco ne nous suffit plus à emballer. Passé un certain âge, c'est moins la musique que le compte en banque ou l'importation de matière fraîche des pays de l'Est qui peut nous permettre encore un peu de bounga bounga.

Alors, ma foi, on en revient, solitaire comme aux premiers jours, à ce disque de Donna Summer, à sa pochette et à son quart d'heure d'intimité luxuriante, dans l'anti-chambre de la mort. No future.

dimanche 16 mars 2014

GCDBMDD #4 : The Chemical Brothers "Dig Your Own Hole"

Thème du jour : There's no future, no future, no future for you - Le disque que vous écoutez quand tout semble sans issues, histoire de se rouler dans le désespoir...

Alors très franchement, dans ce genre de situation, j'aurais plutôt tendance à écouter le glouglou du Jack Daniels qui coule dans mon verre, puis à m'abrutir devant des vidéos débiles sur youtube. Désolé, mais pas de Leonard Cohen afterworld pour moi dans ces moments-là. Pas non plus de Nick Cave ni de Johnny Cash période Rick Rubin. Alors oui, j'aurais pu vous parler de Tonight's The Night de Neil Young, peut-être. Celui-ci prend le taureau par les cornes, mais au bout du sillon, on reste dans le même état. Voire pire. Et l'objectif, c'est de s'en sortir, et de ne pas faire le grand saut, si ? Ce genre de poisons, au contraire, je me le distille quand tout va bien. A petite dose, histoire de garder le contrôle, et d'éviter le mauvais trip.

Non, quand ça va mal, je cherche par tous les moyens à me cisailler la tête, à éviter de penser, hauts les watts ! Alors j'ai ma petite arme secrète. Ce disque, Dig Your Own Hole des Chemical Brothers. Rque le titre, déjà, creuse ton propre trou, ok, on y va. Leur black album, en fait. Sans concessions. Rien que le titre, déjà, creuse ton propre trou, ok, on y va. Rien que le Block Rockin' Beats d'ouverture (qui cartonna très justement à cette époque) me donne la jouissive sensation de pouvoir éclater la tronche à qui j'ai envie, à commencer par la mienne. C'est fort, très très fort, répétitif à l'envie, ici pas de breaks, de temps calme ou quoi que ce soit qui pourrait vous ramener à la surface et - mon dieu - penser. Bidouillages electro concoctés avec vice, cruauté et intelligence malsaine par les deux frangins chimiques, impeccable. Et puis surtout, ces semples de vraie batterie bien loin des TR machin chose un peu mous. Tout cela reste organique, ça sent la sueur, voyez-vous ?

Les salopiaux déconstruisent le rock'n'roll comme on dissèque un poulet, font grincer leurs oscillateurs par dessus, pimentent le tout de distorsion à tous les étages, ne cherchent pas à adoucir le tout d'un quelconque semblant de mélodie. En ripant le CD, on voit bien comment tout cela est compressé à bloc, pour que ça sonne plus fort que les autres. Comme le Led Zep III qui avait été mixé à cet effet : pousser l'électrophone dans ses retranchements.

Ce fut la révélation pour moi, en 1997. Justement, c'était un jour où j'allais pas trop bien, j'étais allé voir mon disquaire (voir ce mot dans tout bon Larousse d'avant 2000), nous partagions une même passion pour Bashung, Manset, Miles Davis et les Beach Boys, et avec son air paternaliste (le monsieur connaissait sa clientèle) m'avait dit, tiens, viens voir, écoute donc ça ! 

J'ai cru un instant que j'allais être gagné par la fièvre de l'electro, mais la suite, toute la suite, m'a déçu. A commencer par eux, qui ont largement mis de l'eau dans leur vin. Mais il reste cet album courageux, sans issue, pierre angulaire de ce qui aurait pu définitivement renvoyer les rockers dans leurs caves. Comble d'ironie, ils invitent même Noel Gallagher à pousser la chansonnette. Noel Gallagher ! Le roi de la brit-pop tartignolle, le seul à être capable d'enculer une mouche (et au passage tout le Royaume-Uni) avec une Gibson Lespaul ! Warf !

Tout du long, c'est déballage de synthés analogiques grinçants, insupportables, tout cela sans complexe aucun. Dans ta gueule ! Bien armé celui qui tiendra tout l'album sans péter un câble, et c'est tant mieux : quand je vais mal, je déteste également mes voisins. On frôle parfois le ridicule (Don't Stop The Rock, quelle ironie dans le titre), mais on s'y complait. Territoires inconnus, les Chemical Brothers étaient capables de vous emmener n'importe où, n'importe comment, et putain de bois c'est ça qui était bon. Aucune chance en enfournant la galette d'avoir la moindre idée vers où tout ça vous mènerait.

Alors entre deux blip-blip parfois surnage aussi un groove imparable (Lost In The K-Hole), et on se disait, 20 ans après 1977 que cela pouvait nous sauver. Fuck Art Let's Dance, comme disaient les autres.

Les frangins se permettaient tout. Y compris d'inviter Beth Orton, néo-folkeuse, pour la noyer dans la masse, et de terminer tout ça par un after façon Tomorrow Never Knows. The Private Psychedelic Reel, avec son sitar, reste aussi inécoutable que le Within You Without You de George Harrison. Et c'est bien ça le problème, finalement. L'histoire se répète, et le miracle n'aura pas lieu.

Les albums des Chemical Brothers sont aujourd'hui à peu près aussi ennuyeux qu'une compilation de Vangelis, et ciselés pour sonner du feu de dieu dans l'auto-radio de votre BMW.

On devrait pas vieillir, et c'est exactement ce qui, bien souvent, me colle au fond du trou. La boucle est bouclée, au sens propre comme au figuré. On en sort rincé, mais n'était-ce pas le but recherché ?

Epilogue : Toujours est-il qu'aujourd'hui encore, quand je n'écoute pas l'album, je m'amuse dans mon home-studio à bidouiller des machins dans le genre, et ça me calme, si vous saviez, bien mieux qu'à essayer de compléter le puzzle de la Joconde à 10 000 pièces. Je me laisse aller, je m'amuse, j'ose tout, je me régale, je suis tout seul dans mon délire onirique. Tout ça grâce à ce putain de disque, tiens, rien que d'en parler ça me rend heureux.

Get Up On It Like This !

PS : encore une fois, désolé pour le retard. Promis, j'ai pas regardé ce qu'avaient posté les copains...

vendredi 14 mars 2014

GCDBMDD #3 : Miles Davis "Kind Of Blue (Mono Edition)"

Thème du jour : Je lui dirais les mots bleus, les mots qu'on dit avec les yeux - Un disque qui se passe de mots, et très bien, merci !...










mercredi 12 mars 2014

GCDBMDD #2 : Todd Rundgren "A Wizard, A True Star"

Thème du jour : There's too much, too much, too much - Un disque beaucoup trop compliqué, indigeste, ampoulé... Il y a un peu de trop partout mais... c'est pour ça que vous l'aimez

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Franchement, j'ai beaucoup rigolé lorsque Jimmy a posté Drama de Yes. Sacré fanfaron, ce Jimmy ! Trop drôle. Sauf que, pour le thème de l'album ampoulé trop trop trop, Tales From Topographic Oceans s'était posé là. Je l'aime bien ce disque. Un des premiers que j'ai achetés. Fallait choisir, pas se louper, et même dans ce cas on l'écoutait grave, histoire d'arriver à y piocher le peu de jouvence qui pouvait s'y trouver. Très très jésuite comme occupation. Mais ça vous forgeait une méthodologie, une patience, un respect sans borne. Bon, ceci dit, on va pas passer le concours à poster du Yes, et puis aujourd'hui, même si je l'aime toujours, c'est un peu inavouable, et j'ai d'avantage envie de poster des disques avouables. Comme ce Todd Rundgren. Un génie, ce gars. Un cinglé complet aussi. Bref, deux fois plus génial.

A Wizard, A True Star constitue semble-t-il une des pierres angulaires de son oeuvre. 12 chansons sur la face A, 7 sur la face B. Difficile à battre, et bien loin des soli de guitare de 18 minutes de l'époque (1974). Pour autant, on est loin d'un Dr Feelgood alignant les tirs de boulet rouge. Des petits bonbons trop sucrés et englués d'effets de studio sans doute pyrotechniques, mais... comment dire... comment suivre ce truc ? 55 minutes compressées sur un vinyle, on peut guère en mettre plus. Et entre la reprise du thème de Peter Pan et le medley rythm'n'blues, on se demande où l'on va. Ceci dit, l'effet feu d'artifice fonctionne totalement. Oh la belle bleue ! Oh la belle rouge ! A peine une mélodie se dégage-t-elle de l'engluement volontaire des arrangements que l'on passe à autre chose.

Bien sûr, et conformément au thème du jour, c'est trop. On a l'impression de déguster des pâtisseries portugaises les unes après les autres. Toutes trop sucrées, trop savoureuses. La première, ça passe, curiosité aidant, la deuxième aussi et puis... bon, faut vraiment finir le plat ? En même temps, chacune d'entre ces petites vignettes possède un je-ne-sais-quoi qui pousse à goûter la suivante, même si l'on sent dans son for intérieur que la digestion ne va pas être simple. C'est ce que j'appellerais le Haribo Concept Album. On abhorre, mais les papilles ou les tympans en redemandent, car la curiosité prend le pas sur le semblant de fonctions vitales qui vous disent stoooop !!!

Alors, tout peut agacer sur ce disque. Le concept, la performance, le côté prog rock, mais malgré tout, on sent l'artiste suffisamment barré et sincère pour se laisser prendre au jeu. Pour accepter le titre prétentieux et sans doute au second degré de l'album. Pour supporter la vilénie de la pochette, digne d'Emerson, Lake & Palmer. Parce qu'on sent bien que la chose part ailleurs, qu'elle n'a aucune vélléité à toiser les dinosaures de l'époque dans le top ten.

Et puis, surtout, surtout, c'est un disque qui dérange. On s'en fait cinq morceaux, on craque, on range, et puis on y revient. On cherche, on renifle, on trouve une clé, on la perd, on comprend pas. Un machin luxuriant, plein de perles de pacotille, que raisonnablement on devrait oublier au plus vite, mais va savoir pourquoi tous les six mois que Dieu fait la galette se retrouve en haut de la pile. On l'essaie entre amis, jusqu'au fatal "on peut changer la musique ?" pourtant peu poli en société. Et sitôt le disque zappé, l'apéro est flingué parce qu'on attend qu'une seule chose, que tout le monde se barre pour se faire un dernier verre et retenter le truc.

A décrie, c'est pas simple. Une sorte de croisement entre Queen, Traffic et les Beach Boys ? Oui, mais manque encore un peu de... de quoi ? Beatles ? Can (oui, même Can) ? Carpenters ? Lewis Furey ? SparksYes ? Zappa ? Chicago ? Foreigner ? Soap Opera ? Oh j'y rajouterais bien un peu de Kinks pour l'humour et tout ce que vous voudrez de variétoche, même les fans d'Elton John pourraient trouver ça funky... Chaque morceau m'inspire une influence géniale ou indigeste, tout à la fois... Chaque minute bien digérée pourrait chier un tube rock FM, de quoi se payer une villa sur Sunset Boulevard. Beurk... ne vomissez pas en lisant. Vous vous poserez la question comme moi et vous y reviendrez.

Inlassablement...

Never never land...

lundi 10 mars 2014

GCDBMDD #1 : Mississippi John Hurt "Today !"

Thème du jour : Oh Honey Why don't you come back - Le disque du retour, pour le meilleur ou pour le pire, à vous de choisir

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C'est tout vu. Rien qu'à l'idée de poster Chinese Democracy j'ai envie d'aller me coucher. Bousiller la bande passante des internautes pour télécharger une crotte pareille, c'est pas humain. Remarquez que dans le genre "Grand Retour", Chééérie, je suis làaaa, les daubes se posent là aussi. Même une grande dame comme Patti Smith m'avait gonflé à l'époque avec son People Have The Power décalé et maladroit. Sans parler du retour posthume de Joe Dassin qui n'avait rien demandé à personne, et surtout pas sans doute de promouvoir la carrière de cette connasse d'Hélène Séguara.

Tenez, je me souviens du grand retour des Byrds en concert à Bordeaux. Jeune et con, j'avais pris ma place avant de me rendre compte que des Byrds originaux il n'y avait personne, sauf le cousin du batteur, et encore. Je suis même parenté dans la salle.

Alors si, un retour fracassant, ce fut pour moi en 2013 celui de Black Sabbath. Production sublime de Rick Rubin, un bien bel album.  C'est con j'y pense maintenant alors que mon post est en route. J'espère sincèrement que Tommy Iommi va s'en sortir. L'autre, je m'en fiche, qu'il se tape du jus de chauve-souris tous les matins, mais Tommy je l'aime bien.

Non, là c'est d'un autre type de retour dont je vous parle. Une bagatelle de trente ans d'absences. Et pas pour faire le kéké dans les cocktails ou pour vendre du Viandox à la télé. Non, pour rentrer chez lui, poser la guitare, et reprendre un boulot de métayer (terme moderne d'esclave depuis l'abolition, dans le sud des Etats-Unis). Qu'a-t-il pu ruminer en retournant la terre ? A-t-il seulement ruminé ? Bof, quelques faces de 78 tours, c'était finalement marrant, peut-être même que ça lui avait payé une guitare correcte et un peu de bon temps. Mais ce genre de miracle ne dure pas, c'est pas du boulot que de chanter devant une machine. Ca fait pas bouffer la famille, ça peut pas ramener de l'argent. Ca se saurait si depuis que l'homme a été chassé du paradis il pouvait s'en sortir sans trimer toute sa vie. Sans le savoir, un Dock Boggs ou un Clarence Ashley devaient penser la même chose même s'ils donnaient pas dans les race records. Blanc ou noir, quelle importance quand t'es dans la merde ? La vie, elle est simple comme trois accords, comme l'histoire de Stagger Lee. Va-t-en pas croire à un miracle, ça va mal finir. Et fais plutôt gaffe d'ailleurs si tu veux pas d'histoires. On racontait vaguement dans le coin que ces pactes avec le Diable (payé à rien foutre, quoi) ça pouvait te dézinguer plus vite que tu ne le pensais, parce que les gens sont mauvais. Y'a même pas besoin du diable, d'ailleurs. Faut pas se frotter à certaines gens. N'est-ce pas, Stagger Lee ?

- Monsieur John Hurt ?
- Ouais M'sieur, à vot' service !
- Mississippi John Hurt ?
- Ouais M'sieur, c'est comme ça qu'on m'appelait, quand j'étais jeune

La suite est connue, on est en plein boom folk-blues, l'Anthology Of American Folk Music de Harry Smith a fait son effet, la jeunesse branchouille américaine se cherche des racines.

Alors Mississippi John Hurt est remonté à New York, a chanté les mêmes chansons qu'il y a trente ans, même qu'on lui a payé l'hôtel et que ce coup-ci il jouait carrément devant des foules de blancs drôlement gentils. Il avait même calculé qu'avec ce qu'il avait gagné en une année, ça lui paierait bien un ou deux acres de terre, chez lui dans le Sud. Bon sang, ce truc, ça peut pas durer. Payé à rien foutre. Dans le public, des Jorma Kaukonen, des Jerry Garcia, n'allaient pas s'en remettre. Des Marcel Dadi nous casseraient les bonbons pendant des années avec leurs voltiges de guitare picking, mais c'était sans doute le prix à payer aussi. D'autres seraient également bien ennuyés car, après avoir tenté de véhiculer un idiome du "blues", voilà un nigger qui chantait et jouait comme un blanc. Merde alors, ça pouvait être dangereux, ça. Des blancs qui imitent les nègres, c'est drôle, l'inverse beaucoup moins. Et l'autre possibilité, à savoir personne n'imite personne mais la musique que tu as dans les tripes quand t'es dans la merde est la même quelque soit la couleur de peau, c'était peut-être même pire.

Mais Mississippi John Hurt était un bon nègre. Il mourut après deux-trois ans de ce revival inespéré.Dangereux, d'être payé à rien foutre.

Candy Man...

Grand Concours : le retour ?

Bon ben ça c'est de l'acte manqué ! Thème du jour : le grand retour et j'oublie de poster. Ceci dit, je m'en charge dès ce soir, promis. Vous comprendrez que d'ici-là je n'aille pas butiner sur vos blogs, question d'être réglé, quoi ! Bon ben à ce soir...