J'ai acheté des CD depuis 1986 (et plein de vinyles avant), j'y ai mis énormément d'argent. J'en ai souvent racheté (remasterisations, bonus tracks...) et aujourd'hui tout ça ne vaut plus rien. Les rayons se vident au profit des DVD, des blu-ray disc (tout pour les yeux, rien pour les oreilles), en attendant le prochain format.

Et pourtant... c'était pas beau tout ça ?


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mercredi 15 mai 2013

#21Z : David Bowie "The Next Day"

10 ans après, le jour d'après... Il nous a manqué, Bowie, c'est indéniable. Des pires doutes sur sa santé (toujours pas complètement éteints), de son invisibilité caractérisée, à une quasi totale absence de nouvelles, on le croyait perdu ! Et puis une affiche, "the next day" dans un carré blanc sur la pochette de Heroes que, forcément, on repère facilement, un nouvel album !, enfin ! C'est moche, on croit à un teaser, ce sera finalement la pochette, drôle de choix. Quoique... Comme un signe que le jour d'après sera aussi beau que le jour d'avant ? Comme un aveu de retour vers des sources ô combien prolifiques, un raccrochage de wagon vers une gloire passée ? A voir... A entendre surtout.

Bon, autant éventer le "secret" tout de suite, ce n'est pas du grand Bowie, pas le retour miraculeux  qu'on n'attendait de toute façon pas. Ce n'est pas indigne non plus, rassurez-vous. Des dires de Tony Visconti, producteur de la galette et  collaborateur récurrent de David depuis plus de 30 ans, c'est Bowie qui a eu de nouveau envie de faire des chansons et, fatalement, de faire un album, un album qu'on n'attendait plus et qu'on prend donc pour ce qu'il est avec la réalisation de la chance que nous avons d'avoir un nouveau Bowie en 2013 si ce n'est un grand Bowie, ce à quoi nous sommes de toute façon habitué, pour retrouver un Grand Bowie, il faut quand même se reporter une trentaine d'année en arrière...

Pas un grand mais un bon Bowie qui a toujours la voix (même si un peu moins de voix), bon signe. Un bon Bowie avec son lot de pépites, plutôt plus généreux que ne l'avaient été Reality, Hours et Heathen, des pépites qui, si elles ne révolutionneront rien à la perception qu'on les gens de l'artiste, font bien plaisir à entendre ! Et ça commence dès le morceau titre et introductif de la galette qui, rock solide et énergique, rappelle autant  "Heroes" que Tin Machine tout en dégageant une fugace impression de mélancolie qui ne lâchera que rarement  l'album. Impression renforcée par la ballade tristoune Where Are We Know?, une des plus belles réussites de l'ensemble, ceci dit en passant. Et implosée par la conclusion (de l'album classique, rallongé de 3 pistes bonus dans sa version "deluxe"), le froid et beau Heat qui convoque, magnifiquement pour le coup, la veine dramatique jadis habitée par le Scott Walker de la fin des 60s. Mais un Bowie qui s'amuse aussi comme sur le Kurt-Weilien/ Tom-Waitsien mais en même temps si Bowieien Dirty Boys, comme sur le joliment Beatles Valentine's Day (où la voix de David et la guitare d'Earl Slick font la différence), comme quand il nous balance sans crier gare en plein Outside (If You Can See Me) pour un exercice "Drum'n'Rock" réussi. comme quand il cold-rocke avec classe sur le new-waveux Boss of Me. Etc. Oui, il y a plus qu'aisément matière à se réjouir dans une tracklist ceci dit pas d'une folle cohérence... un poil "éclatée".

Parce que, forcément, il y a une tenace impression de revisitation continuelle des cannons passés, un jeu de piste à identifier à quelle période d'hier se réfère chaque chanson d'aujourd'hui, une sorte de relecture à l'aulne du jour d'un passé lointain mais toujours vivace. C'est souvent le jeu des vieux rockers que de revenir à la source de leurs exploits (voir McCartney, Springsteen ou Robert Plant pour ceux qui le réussissent le mieux), de tenter, dans le procédé, de se réinventer ou, à minima, de faire ce qu'ils savent faire, ce qui leur vient naturellement et donc, fatalement, de rappeler qu'ils sont qui ils sont... Bowie n'est pas une exception en la matière. A ceux que l'absence de toute épiphanie créatrice, de quelque inespérée et miraculeuse régénération chagrine, on répondra que Mr. David Bowie a maintenant 66 ans, s'est déjàç recréé un bonne demi-douzaine de fois pour finir par être lui, somme de tous ses possibles, miraculé d'excès qui en ont laissé moult sur le carreau. C'est déjà beaucoup.

Beaucoup parce que The Next Day est un bon album, du Bowie supra-classique, du Bowie qui satisfait en ratissant large mais en restant digne parce que, et nous ne tirerons pas sur les quelques ambulances qui traversent l'opus, les chansons sont bonnes, bien arrangées, bien jouées (par peu ou prou la même équipe que Reality), bien enregistrées, bien mixées... Bien. Ce n'est pas Hunky Dory, ce n'est pas Ziggy Stardust, ce n'est pas Low, ces références immortelles appartiennent à un passé créatif qui ne revivra plus ou plus que fugitivement, c'est le cru 2013 plus qu'honorable d'un mec qui nous a tous, à un moment ou un autre, fait quelque chose... Et qui réussit au moins à nous rajeunir les tympans d'au moins une décennie en se ressemblant juste ce qu'il faut, et donc en se différenciant légèrement aussi de ce qu'il fut, pour ne pas paraître incongru, ou bêtement revivaliste.

Evidemment, l'évènement se suffisant à lui-même, l'album cartonne avec des numéros 1 en Argentine, Belgique, Croatie, Tchéquie, Danemark, Pays-Bas, Finlande, Allemagne, Eire, Nouvelle-Zélande, Norvège, Pologne, Portugal, Royaume Uni, Suède, Suisse et Etats Unis d'Amérique, et pas loin derrière dans le reste des pays où la musique pop est disponible. Ce n'est, dans le fond, que mérité, couronnant comme il se doit la carrière d'une icone qui a, comme vous l'aurez compris, de forts beaux restes, qu'il a su savamment déployer sur cette résurrectionnelle galette. Que l'avenir réserve-t-il à Bowie ? Quelles seront ses prochaines aventures ? Y aura-t-il seulement de nouvelles aventures ? Autant de questions qui restent pour le moment sans réponse. Reste la satisfaction de tenir, je le répète, un bon Bowie, en 2013, toujours vivant !, et ça, ce n'est pas rien !


1. The Next Day 3:26
2. Dirty Boys 2:58
3. The Stars (Are Out Tonight) 3:57
4. Love Is Lost 3:57
5. Where Are We Now? 4:09
6. Valentine's Day 3:02
7. If You Can See Me 3:12
8. I'd Rather Be High 3:45
9. Boss Of Me 4:09
10. Dancing Out In Space 3:21
11. How Does The Grass Grow? 4:34
12. (You Will) Set The World On Fire 3:32
13. You Feel So Lonely You Could Die 4:37
14. Heat 4:25
Bonus
15. So She 2:31
16. Plan 2:02
17. I'll Take You There 2:41


- David Bowie: vocals (1–15, 17), producer, guitar (1, 16), string arrangement (1, 3, 15),
acoustic guitar (3, 13–15, 17), keyboards (4, 5, 7, 10, 11, 15–17), percussion (16)
- Tony Visconti – engineer, mixing, producer, string arrangement (1, 3, 13–15),
guitar (2, 13, 15, 17), recorder (3, 9), strings (5), bass guitar (6, 12, 15)
- Zachary Alford: drums (1–5, 7–11, 13–17), percussion (7)
- Sterling Campbell: drums (6, 12), tambourine (12)
- Gail Ann Dorsey: bass guitar (1, 3, 4, 10, 11, 13, 14, 17),
backing vocals (3, 7, 9, 11–13, 17)
- Steve Elson: baritone saxophone (2, 3, 9), contrabass clarinet (3)
- Henry Hey: piano (5, 13)
- Gerry Leonard: guitar (1–5, 7–15, 17), keyboards (15)
- Tony Levin: bass guitar (2, 5, 7–9)
- Janice Pendarvis: backing vocals (3, 9, 12, 13, 17)
- Earl Slick: guitar (2, 6, 12)
- David Torn: guitar (1, 3, 7, 10, 11, 13–15, 17)
- Hiroko Taguchi: strings (1, 3, 13–15)
- Antoine Silverman: strings (1, 3, 13–15)
- Maxim Moston: strings (1, 3, 13–15)
- Anja Wood: strings (1, 3, 13–15)


Where are we now?

13 commentaires:

  1. Un disque qui fait plaisir de par son existence plus que par sa présence sur la feutrine de la platine.
    Chouette papier en tout cas.
    Hugo

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    1. Un disque qui fait plaisir par son existence ET sa présence sur la platine. Y a du déchet, y en a toujours eu chez Bowie ou presque, mais on n'est pas loin du miracle (in)espéré.

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  2. Hi Zorno

    Et oui, on en a déjà parlé ici ou là, de l'opinion générale il ressort que ce Next Day est un bon cru à défaut d'être le chef d’œuvre que nous n'aurons sûrement plus jamais. Nous sommes donc bien du même avis sur la question. Mais le plus important pour moi est que je retrouve plaisir à écouter un nouveau Bowie alors que depuis 30 ans je m'ennuyais ferme (Tin Machine compris d'ailleurs).

    Je ne l'ai pas encore acheté mais c'est prévu, prochainement, peut-être ce soir tiens puisqu'on en parle.

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    1. La version deluxe vaut le coup. Trois titres en plus qui s'écoutent bien et un beau digipack. ;-)

      Pour le reste, tout comme toi sauf que Bowie ne m'a pas toujours ennuyé ces 30 dernières années (qui en comprennent 10 d'inactivité, ceci dit en passant).

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  3. Grand disque, son meilleur depuis Lodger perso...

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    1. Et Let's Dance ? et Earthling ? et Outside ?
      Je reviendrai bientôt sur au moins un des trois !

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  4. Ceci est une bonne chronique. Je ne dis pas ça parce que je partage ton avis, et je le partage, je dis ça parce que c'est une bonne chronique.
    Content d'apprendre que ce disque fonctione bien dans les écoutes 'aujourd'hui.
    Et pour le renouvellement, je ne vois pas pourquoi il faudrait toujours cette pression sur l'artiste. En tant que non musicien j'ai l'intuition que son inspiration suffit amplement à éviter la sensation de redite.

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    1. Tu as raison, Antoine, le sel est désormais dans les détails, dans la finesse et la réussite de l'écriture mais, que veux tu ?, on attend toujours un miracle d'un miraculé... La prochaine fois, peut-être...

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  5. Ben franchement pour moi il y a trop de références sur tout, j'ai pas pu finir l'article.

    Sylvie

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  6. Puisqu'on est sur le sujet, j'ose un coup d'autopromo:
    http://ranxzevox.blogspot.fr/2010/01/bowie.html
    Merci

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