Thème du jour : LIFE ON MARS ? Une musique d'une autre planète ou presque.
Avant-Propos
Depuis quelques temps, je me mets à racheter des vinyles. Non content de m'être fait gentiment dépouiller depuis 1985, quand je pense à tout le fric que j'ai laissé dans les CD, je continue à avoir besoin d'acheter des disques. Cherchez pas, c'est comme ça, tant pis pour moi.
Alors quand je suis tombé sur ce double album, pochette illustrée par Druillet, pochette en gros carton comme les imports américains de ma jeunesse, vinyles transparents, édition numérotée, CD inclus, voilà, je l'ai ramené chez moi.
A la fois intrigué par les inconnus (Droids, René Roussel, Bernard Fevre...), amusé par les improbables (Patrick Juvet, Pierre Bachelet...), rassuré par les incontournables (Cerrone, Jean-Michel Jarre...) et agacé par les inévitables cautions de bon goût (Gainsbourg, Alain Goraguer, François de Roubaix...), il y avait là assez de matière à compulser l'objet, caresser les vinyles et mettre le vulgaire CD dans la platine. Et là...
...aucune surprise. Un peu de plaisir à redécouvrir Magic Fly de Space - alias Didier Marouani & Co. - se la péter Dance Floor avant l'heure, rigoler sur le générique de Temps X (sacré Didier, le même), constater que l'E.V.A de Jean-Jacques Perrey ressemble à une version édulcorée mais rigolote de la Messe Pour Le Temps Présent, et finalement me dire que tout cela a, contre toute attente, assez bien vieilli. A l'heure ou Daft Punk cartonne avec de vrais instruments, on peut se poser des questions.
Chapitre 1 : 1977
Igor et Grishka, s'il vous plaît, re-projetez-moi à l'heure du décès de Clo-Clo, quand je mangeais mon Nutella en écoutant Space Art (ici présents, quand même, bravo, même si c'est pas Onyx, quel dommage !). Je naviguais, sidéral, entre deux faces. Je venais à peine de commander Oxygène au Club Dial que le copain à ma soeur me faisait découvrir Meddle du Pink Floyd. Contrairement à toute attente, on ne mélangeait pas tout. C'était l'été, Animals venait de sortir, et ça buzzait même dans mon petit village.
En fait, les grands de 15 ans méprisaient ces trucs aux synthé, limite ils paniquaient. Même le disco, Cerrone en tête, c'était tabou. OK pour les synthés sur Wish You Were Here, mais Gilmour ramenait tout le monde à la maison. Et ils étaient quatre. Ils étaient un groupe. Et Kraftwerk, tout pareil, ou presque. On venait de prendre le choc pétrolier dans la figure, on parlait du prix de l'essence, de l'inflation, et ces trucs synthétiques ne nous donnaient absolument pas envie d'aller vers l'an 2000. Comment ils font ça les mecs ? Bah ils ont plein de synthétiseurs... Des trucs qu'ont pouvait même pas imaginer s'en acheter un seul, on savait même pas où, on connaissait même pas le nom de Moog. Ca a duré jusqu'au Fairlight, dans les années 1982, par là. Cette sorte de révolte ouvrière, putain, on avait des guitares, on était largués. Sauf à jouer Wish You Were Here. C'était bon pour les gosses, Oxygène, mais le mépris est venu tôt. On a continué à écouter Made In Japan longtemps.
On s'est pas fait avoir par le truc, en somme. Vite balayé avec joie par le punk. Voire même par des trucs comme Abba qui ramenaient la chanson au coeur du débat. No future pour le bling-bling.
Chapitre 2 : 2013
Chez Thomann, une guitare en bois, ça tape minimum ses 150 euros. Impossible à télécharger, une guitare. Impossible à pirater. En cherchant un peu, en vingt minutes vous êtes largement plus équipé que Jean-Michel Jarre à l'époque, côté DAW et plug-ins. T'en veux du Mini-Moog ? Du VCS 3 ? Du Prophet V ? Et ça sonne, en plus. Et on fait mieux, bien mieux, de l'hallucinant, à la portée de ta souris. Reaktor, Massive, tous ces trucs, c'est du délire ambiant. Alors tu prends n'importe quel morceau de cette compile, avec deux ans de solfège, tu fais mieux, plus groovy, plus... moins... vintage...
En écoutant tout ça, on se dit que, paf ! boum ! ça met une calotte définitive à Daft Punk ! Justice ! Dans le livret, un des mecs de Justice t'explique combien il a été influencé par tout ça. Limite, il a jamais écouté autre chose. Ca n'est pas le problème, musicalement. Là, je me remets Magic Fly, je trouve ça toujours aussi marrant.
Sauf qu'aujourd'hui, on est peu nombreux finalement à défendre des groupes, des artistes jouant avec des guitares en bois.
Aujourd'hui, faut jouer de l'Adobe Premiere Pro et de l'After Effects pour péter une vidéo qui crache sur YouTube. De l'Ableton Live pour sampler la 12 cordes à papa. Voire jouer vaguement un riff de guitare soi-même qu'on corrigera après coup pour qu'il soit dans le beat, pas grave.
Aujourd'hui, faut jouer de l'Adobe Premiere Pro et de l'After Effects pour péter une vidéo qui crache sur YouTube. De l'Ableton Live pour sampler la 12 cordes à papa. Voire jouer vaguement un riff de guitare soi-même qu'on corrigera après coup pour qu'il soit dans le beat, pas grave.
Et s'émerveiller de ce disque, Cosmic Machine, parce que les mecs, purée, ils avaient même pas un sequencer, ils jouaient vraiment du synthé. Et ils avaient même une sacré imagination. De belles idées.
Oui, ils en avaient. Ils se servaient aussi de leurs doigts pour créer de la musique électro. Pardon, électronique.
Chapitre 3 : 1938
La Hammond Company sort le premier synthétiseur, le Novachord. 2ème guerre mondiale oblige, le machin dure quatre ans. Franklin Roosevelt aura beau en recevoir un en cadeau, ça ne marche pas. Peut-être autre chose à faire, en 1940, que de faire des poulet-pouet sur un machin de science-fiction. Qui servira d'ailleurs toujours à ça, de la science-fiction. On peut l'entendre sur les BO du Faucon Maltais, d'Autant En Emporte Le Vent, paraît-il. Ambiance. Tout est là, ambiance. Le truc démarre.
Epilogue
Et là, nous, les Français, on est balèze pour l'ambiance. Depuis l'accordéon musette jusqu'aux discours putrides, on y met de l'ambiance, à tous les étages !!! En attendant le premier envol d'Ariane, on t'a traficoté des machins pas piqués des vers. Tiens, le Ombilic Contact de The Atomic Crocus ou le Spirit de Frédéric Mercier, on te le revendra vingt ans plus tard au niveau planétaire avec Air. Et les Quatrz te recyclent You Really Got Me d'une façon que Daft Punk se fait encore pipi dessus. Allez, Daft Punk, y'a encore des sous à faire ! Finalement ce disque devrait figurer dans toute bonne valise diplomatique d'ambassadeur culturel. Purée, comment on a bien anticipé le XXIème siècle ! Finalement, on a gagné !
Bon. J'ai échappé de peu au doublon. Mais au moins l'album est présent dans le Jeu!
RépondreSupprimer;o)
SupprimerM'en parle pas..le fric dans les skeud depuis ces décennies !!! je pourrais avec ..euhhhh m'acheter des disk. J'ai vu Bachelet et Daft Punk..novachord et la meuf de dark vador en pochette..tu viens d'où Djeep ??
RépondreSupprimerOut of space...
SupprimerT'as bien raison, on ne dit jamais assez que Daft Punk c'était déjà has-been avant même d'exister.
RépondreSupprimerAh bon ?
RépondreSupprimerExcellente cette compile, je l'ai chroniqué tout récemment...
RépondreSupprimerRien que pour mon idole de toujours, Patrick Juvet, je charge !!!!!
RépondreSupprimerPochette magnifique du géant Druillet.
J'écoute et je reviens.
Où sont les femmeuh, avec leurs gestes plein de charmeuh !!!!!
Terrible ! Comme dirait Katerine, j'adoooooooooooore !!!
RépondreSupprimerAmateur de S.F, de "Temps X", de rétro-futurisme, de Kosmische Music et des débuts de l'électro/Synth', c'est le disque idéal !!!
Un disque regroupant les pionniers des musiques électroniques.
A + et BIG MERCI.
Quel article !...
RépondreSupprimerBon, moi, dès que t'évoques des noms de synthé je lis, je m'arrête, je visualise, je fais joujou les petits boutons, alors t'imagines...
L'autre jour mon aîné, fan de vieux synthés lui aussi, m'a mis dans le mains un super joujou de 20cm, petit boite korg appelée le monotron... sorte de mini synthé...
branché sur un ampli , de la tuerie...
allez un coup de lfo, de modulator et go, barré dans l'espace...
j'ai joué des heures comme un gosse avec trois petits boutons et un clavier digne du stylophone...
bon là, je reviens à ton album, déjà Druillet...
la grosse part de mon adolescence qui m'a justement barré vers ces groupes électro genre devenu krautrock alors qu'on savait même pas à quoi les faire correspondre, genre, rock synthétique, rock électronique, etc...
ces bidouilleurs de génie ont barré la musique vers des sphères lointaines et nous les ont rendu presque accessibles...
ableton...
protools...
cubase...
acid...
d'un clic... mais avec des oreilles...
pas besoin de notions, mais sans eux on n'en serait pas là.
MERCI !
à +
Je me disais quelques plusieurs choses.
RépondreSupprimerLe plus honteux en dernier.
mais avant tout, pour le non musicien que je suis, pourquoi ne pas regarder ces strates comme des ajouts et non comme des annulant/remplaçant? Et puis vous qui jouez et composez, est ce que ces nouveautés n'ouvrent pas des horizons qui autorisent d'ajouter de la musique encore à de la musique qui existe.
Je me suis toujours demandé comment se vivait la création. Innovation et/ou reconnaissance de ses pairs? Du public? D'un public?
Davantage viscéral que cérébral?
Quand Gainsbourg plaçait la chanson comme art mineur, c'était de l'aquabonisme?
Bon, je fini par une demande que je fais circuler, qui sait, en même temps que cet album compilant du Frenchy, est sorti dans la catégorie Punk rock
http://www.amazon.fr/Paink-French-Punk-Anthems-1977-1982/dp/B00F570RGA/ref=pd_rhf_ee_p_t_2_RW1J
Et je ne le trouve pas sur le net. Il mes restera l'option médiathèque, je ne tiens pas à l'acheter, j'ai quelques curiosités que je souhaite entendre, c'est tout.
Et bravo pour ton article, c'est toujours aussi réjouissant.
Soyons clairs, JeeP, c'est pas l'album du siècle (même pas de l'année !!!), mais il s'écoute avec beaucoup de plaisir. Les sonorités datent un peu, mais ça le fait encore. Pas sûr que ça enchantent les teufeurs d'aujourd'hui, mais pour des vieux cons comme nous, il y a matière à savourer.
RépondreSupprimerJe mets le CD dans le lecteur de ma soucoupe volante.
Ah oui hein, quand même ...
RépondreSupprimerUne autre Planète que la mienne, c'est certain, je valide et je reviens dans deux jours !
EWG
Jolie chronique pour jolie compile ! Pas sûr d'être aussi dur que toi avec Air & Co., mais si tout le monde était d'accord ça ne serait pas drôle.
RépondreSupprimerD'ailleurs je vais jeter un pavé dans la mare et me faire détester par certains d'entre vous : j'aime et j'écoute Daft Punk & Air & Justice.
Bim !
J'adorais Druillet et ces musiques bizarres citées dans cet album, et cela me fait plaisir d'en retrouver certaines, après sont elles devenues surannées ?
RépondreSupprimer...
RépondreSupprimerSans moi,entre Druillet et le contenu je suis...sur une autre planète ?
Ah ce que j'ai pu détester cette sous-musique dans les années 80-90, c'était de bon ton de dénigrer... Jusqu'à ce que je tombe dedans à mon tours... Du coup, j'oscille entre détestation et amusement... et puis les compiles ça devrait être interdit pendant le grand jeu... Comment ça Super Discount c'était aussi une compile? euh oui bon c'est vrai... Pas de soucis alors... Bien joué!
RépondreSupprimerAgacé par François de Roubaix ? Voyons, voyons...
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