J'ai acheté des CD depuis 1986 (et plein de vinyles avant), j'y ai mis énormément d'argent. J'en ai souvent racheté (remasterisations, bonus tracks...) et aujourd'hui tout ça ne vaut plus rien. Les rayons se vident au profit des DVD, des blu-ray disc (tout pour les yeux, rien pour les oreilles), en attendant le prochain format.

Et pourtant... c'était pas beau tout ça ?


- - - Disapproved by the Central Scrutinizer - - -

mercredi 15 février 2012

JSFDBMDD2 #2: Deep Purple "Made In Japan"

Thème N°2 : Absolutely Live

Ouch, purée de poisse. Absolutely Live. Quoi ? Les Doors et leur album éponyme ? Rod Stewart ? Je ne peux pas m'empêcher de me vautrer dans le concept de l'album Live, de tout le mal et de tout le bien qu'il a fait ces quarante dernières années. Mais de quoi parle-t-on ? OK, d'un concert - ou d'une bribe, gravée dans la cire. Mais Dieu pourquoi faire ça ? Le monde semblait si simple... on nous vendait des disques, et si ça nous plaisait on allait écouter le concert... Non ? Voire l'inverse. Suite à un concert minable de Noir Désir aux Francofolies de la Rochelle en 1989 (si, si, j'assume) j'ai mis des années à accrocher, à leur reconnaître un certain talent. Un talent certain, si vous préférez.

Euh, comment doit-on comprendre ça ? L'album live parfait, ou le live estampillé pur et dur sans retouches studio ? Mais même ça ne veut rien dire. Aujourd'hui, le gratteux n'a même plus la moindre pédale d'effets devant lui. Un technicien appuie sur un bouton et l'artiste passe du chorus à la fuzz, hop, pour le plus grand plaisir du public et la bonne continuation du concert. Live, çà ? Mouais...

Mazette, voilà un thème bien torturé, et bien embarrassant. Je ne vois pas d'autre solution que de vous disserter les différentes sortes d'albums live, leurs tenants et leurs aboutissants. Et c'est une oeuvre bien trapue à laquelle je m'attelle.

Exit les premiers, le live Greatest Hits. Beurk. Aux chiottes Supertramp, Eagles. A la casse, les live "Souvenirs, Souvenirs" systématiques (M, Johnny, Eddy Mitchell, tiens, la carte postale semble être une tradition franchouillarde, non ?). Allez, ne torturons pas inutilement l'exception culturelle, le Paris (opus) de Supertramp logera bien ici aussi. Rendons hommages aux exceptions qui confirment la bonne santé des finances d'Universal. Un Peter Frampton déjà en fin de course a réussi à blouser son monde avec son Comes Alive.

Viennent après les albums live qui peuvent leurrer un temps. Gros succès, donc nécessité de changer de maison de disque pour gratter un meilleur contrat. Ceux-là sont généralement doubles. Pas forcément mauvais, mais puants dans l'esprit. Un exemple ? Bof, il y en a tant... Je suis de bonne humeur, je n'aborderai pas ce côté vénal.

Ensuite, les live insupportables de prétention et d'exhaustivité. Chicago au Carnegie Hall. Quatre vinyles. Oh le bel exploit, mais c'est pas le téléthon, ici, hein ? Yessongs, le triple live de Yes. Prouvant ainsi qu'ils étaient capables d'être aussi virtuoses et insupportables sur scène que sur disque. Allez, les gars, on vous aurait cru sur parole le temps d'un single, pourquoi tant d'effort ?

Après cela, ça devient plus troublant. Viennent ceux qui, par manque d'inspiration momentanée, balancent à la plèbe de quoi survivre jusqu'à une hypothétique suite. On y trouve des chefs d'oeuvre. Tiens, Rock Of Ages du Band, par exemple.

Gloire aux suivants. Ceux qui ne cherchaient pas l'exhaustivité. Osant l'album live en un seul vinyle. Montrer qu'ils étaient capables d'être aussi excitants devant un public d'étudiants binoclards que dans un studio, bien calfeutrés. Le Live At Leeds des Who me vient à l'esprit. Géniale idée (originelle) de Pete Townshend : on ne prend que la fin du concert, quand on est bien chauds, on les assassine en 35 minutes chrono. Frustration à la fin de l'album, mais jouissance proportionnelle à la courte durée de la chose. Cet album à failli constituer mon choix. Mais la flemme de virer tous ces bonus tracks de l'édition remasterisée a calmé mon ardeur. Et pourtant... dans le genre, le No Sleep 'Till Hammersmith de Mötörhead est au même niveau. Waam Baam Thank You Man !

Délices cachés, onanisme assuré en ce qui concerne les bootlegs. Que de promesses sur ces pochettes souvent sibyllines. Raah, à la grande époque, chez Gibert, je sortais avec un CD des Doors, de Dylan, de je-ne-sais-plus-qui, et j'en rêvais dans le train qui me ramenait chez moi. Le rêve était mirifique, l'écoute décevante, tant de fois. Soit un son approximatif, soit un concert bof bof. Oh, y'avait bien le quatrième titre du CD qui dépotait mais... tout ça pour ça ? Live is live, et là, dans mon salon... le relevé de comptes du lendemain m'a fait détester bien des artistes ainsi captés et commercialisés contre la peau de mon cul, excusez la vulgarité.

Alors, diable, que reste-t-il ? Plein de choses. Les Zappa de You Can't Do That On Stage Anymore. les Allman Brothers Band At Fillmore East. Ce genre de choses, tellement parfaites qu'à l'écoute, le terme "live" entre amis de la Haute n'est même pas prononcé. Superbe, point barre.

Et puis...

Et puis, quand on est gosse, en Alsace, vers 1980,  qu'à part la kermesse du village il n'est même pas possible d'imaginer aller écouter Jethro Tull à Colmar (merci, mes parents, sur ce coup-là), il y a un voisin, le grand frère de mon copain, qui me passe Made In Japan sur son électrophone, fenêtre de la chambre de son petit pavillon ouvert. Et bordel, quelle belle claque, simpliste, certes, mais à douze ans on ne se remet pas de ça. Tout y est, le hard rock, la révolte adolescente, tout ça mais, surtout, surtout, un live construit comme une cathédrale. Tout est parfait, bien équilibré.

Allez, je vous refais les titres un par un :


Highway Star, tout le monde ensemble, bon départ. Ca dépote. J'en voudrais encore, des concerts qui envoient une telle purée au démarrage.

Child In Time, honneur au chanteur, jouissif car romantique et brutal à la fois. Raah, Child In Time, merci maman d'avoir lavé les draps...


Smoke On The Water, intemporel. Et, pour le côté live, Ritchie Blackmore oubliant le riff pendant l'intro, ça tue.


The Mule, solo de batterie, réussissant l'exploit de faire taper le public dans ses mains. Chiant, mais bien foutu. Moins pénible que le Moby Dick à John Bonham (out la ! 'tension les commentaires ?). Et puis, que voulez-vous jeunes gens, on aimait ça à l'époque...


Strange Kind Of Woman, duo guitare/voix caricatural mais d'une efficacité sans faille. Putain de bois, Strange Kind Of Woman... Ca laisse des traces partout.


Lazy, honneur à l'organiste, chacun son moment de gloire.

Et Space Truckin'.... 19 minutes de pure sauvagerie avec ses pleins et ses déliés...

A chaque fois un truc dont on ne se remet pas, à douze ans. Oh, allez, on a fait mieux dans tous ces domaines, depuis, mais tout ça sur un seul double album (car le Live se veut double, pour paraître sérieux, qu'il dure 80 minutes en vinyle ou deux fois plus en CD, mais - je l'affirme - il faut toujours deux galettes).

Ce disque m'a bien duré trois ans. A regarder d'un air circonspect les fans de Led Zeppelin. A douze ans, on veut le jus, direct, pas de machins alambiqués. Même quand on a de bonnes notes en 5ème. Raison de plus. On n'a pas deux cent francs à dépenser pour des albums avec des machins acoustiques ou inexploitables dans nos beaux rêves. Deep Purple ruled. Absolutely Live, en plus, dont acte.

PS : non, je n'a pas mis le CD Bonus de la réédition. Découvert à 34 ans, lors de la réédition CD, bien trop tard pour en tirer la substantifique moëlle, comme on dit. Osez à nouveau le vrai truc. Toujours plus, ça veut dire quoi ? Osons la décroissance... Less is more...

Let's Go Space Truckin'

PS2 : Ah quoi ? Tout le monde l'a déjà ? Et alors ? J'ai rencontré un gars dans un bar à Paris tout récemment, la trentaine, qui m'a dit faire découvrir Led Zep à ses copains et copines, comme si c'était le dernier truc hype voire underground. Ca, c'est pas hype, c'est juste jouissif. Aucune étoile Télérama. J'ai horreur des gens qui collent des étoiles aux autres, d'ailleurs.

16 commentaires:

  1. Hello.
    Moi je ne l'ai pas celui-là, mais je le voyais absolument partout et chez tout le monde dans le temps, et maintenant aussi du coup .
    Je me vois mal glisser mon grain de sel dans une chronique si personnellement axée sur ta jeunesse, c'est vrai que le concept du disque live prête à d'infinies digressions, mais on y trouve quand même parfois son bonheur .
    Sinon, Ritchie B qui oublie le riff de "Smoke": il est bien le seul ...
    Everett W. Gilles

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  2. Tu as raison Jeep, quelle torture de choisir un live..je compulse ta liste et il fallait bien faire un choix. J'avais en réserve le formidable live 78 de Jethro Tull, et surtout l'immense "Tapes" de Barclay James Harvest.. groupe complètement boycotté. Le "Paris" je l'ai toujours trouvé un poil en dessous, malgré la passion que je voue à leur début. Il faudrait un jour ressortir des archives les formidables concert de 74/75.. mais il parait qu'il y avait 30 personnes dans la salle. J'ai failli Gansbarre au casino 84 aussi !!!
    Ceci dit, ce Deep est aux nues aussi, malgré tousles défauts que tu sites. Je me souviens pas si c'est une date ou une compile ce live ??? Merci en tout cas pour cette bell epage.

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    1. Hi Charlu, Le BJH aux Abattoirs de la Villette en 81 j'y étais.

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  3. Beau choix, et surtout magnifique chronique... Tout cela est tellement vrai...

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  4. Bon, je suis tombé exactement dedans de la même façon... j'ai fracassé ma batterie, usé mon orgue et me suis déchiré les cordes vocales...
    Ce live in japan du pourpre - l'incontournable d'une génération des débuts du rock lourd.
    Puis l'autre qui m'a littéralement bouleversé a été le purple avec coverdale, le "live in europe" - mêmes délires scéniques, il y a en pour tous et pour tout le monde et, là, comme ça, au milieu de burn, lady double dealer (fallait bien vendre le nouveau groupe) voici une version de mistreated portée par un coverdale surpuissant et survitaminé - un solo de blackmore en sustains qui met une pression... et le final avec hughes qui se défonce sur un rôle de ouh ouh ouh... en plein milieu, sur fonds de babe babe babeeeeee, l'ami david nous tombe un rock me babe à pleurer de feeling... impossible de résister...
    et pour en finir avec un autre live du pourpre (je vais pas citer ici mes live favoris sinon ce sera plus un comment... mais un bouquin, j'en reste donc à l'intitulé pourpre) le "last concert in japan". Ritchie a laissé le navire, tommy bolin est là, pas spécialement à l'aise mais forcément pas évident de tenir la guitare devant des fans nippons face à un légendaire live in japan de première mouture. pourtant, si l'on veut aller au delà de la foire du trône qui suinte sur scène il y aura "you keep on movin" ou hughes est au taquet, un smoke sur chapeaux de roues et un sentiment de fin honorable, si ce n'est respectable.

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  5. allez tout de même quelques uns, vraiment sans penser plus loin, de mes live de chevet :
    - black beauty, live evil, in concert, pangea... de miles davis.
    - le live de bst.
    - live herald de steve hillage
    - love you live des stones
    - ummagumma et a pompei de floyd
    - robin trower "live"
    - alivemutherforya de billy cobham
    - roxy and elsewher - shut up and play yer guitar - live in ny de zappa
    - le premier live de sting avec l'équipe hakim kirkland jones marsalis
    - night from the alhambra de l mc kennitt
    - with crossfire de michael franks
    - moonflower de santana
    - usa de king crimson
    - viva de roxy music
    - whisper not de keith jarrett (pour chelsea bridge et ponciana... et le reste)
    - sex machine de jb
    - in tokyo des lounge lizards
    - second outs de genesis (supers ready - cinema show...)
    - iv de ange
    - vsop live de herbie et flood...
    - live in tokyo de weather report (le premier)
    - alive and well de soft machine
    - here and there de elton (on m'a piqué le vinyle ado...)
    - Johnny winter and ... alive
    - et... et... pfff difficile exercice...
    il y en a tant et tant d'autres effectivement inutiles...
    en tout cas, piochez là dedans, de quoi ravir...

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  6. Jeepee,
    Celui ci était dans ma very short list en compagnie du Gratitude du EW&F et aussi d'un boot "de chez boot" en belle qualité sonore le Live at the Paradiso d'Amsterdam des Pretty Things en 69. J'ai vraiment hésité avec mon post final.
    Sinon pour continuer sur le Deep le Roger Glover edition du Machine Head est une tuerie.

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  7. Mon disque préféré, même en surboum ... jusqu'à la transition: l'arrivée de Dr Feelgood. C'est à ce moment là que j'ai pensé que les Led Zep passeront mieux la barre que les Deep Purple (Gamin je disais Edith Purple)
    Pour les raisons que tu dis, mais du coup la simplicité n'était plus dans le même camp.
    Au fait, dans le bouquin des "Albums live" je découvre avec stupéfaction que en remix, on peu mélanger pour un morceau plusieurs soirées: Ici la basse est mieux, ici la guitare ... OK le live c'est comme au cinéma, truquer pour faire vrai, c'est ça le secret. Mais au moins Zappa avait l'honnêteté de le dire.
    Tiens une vrai déception: LE SCLASH. Je me range dans ceux qui préfère un témoignage de tournée plutôt que de voir trop large dans les dates.

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  8. et crotte pour les fautes

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  9. Total souvenir d'enfance, je vais me le refaire tout en nostalgie.
    Sympa. Sorgual

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  10. @tous : merci pour vos commentaires, et n'oubliez pas la raquette de tennis pour mimer Ritchie Blackmore, la Air Guitar c'est pour les djeuns...
    @LRRooster : tu parles de quelle édition de Machine Head ? Bôf j'en ai trois personnellement, dont celle en deux CD et - ma petite merveille technologique - la version SACD avec les mix en quadriphonie d'époque... c'est beau comme un coucher de soleil sur Venise ;o)
    @Jimmy : Listen without prejudice... Pour une fois que l'expression "bon vieux temps" n'est pas galvaudée...

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  11. Dans bon vieux temps il y a "vieux"...
    gare à la nostalgie les gars...
    mais que c'est bon...
    allez, dernière série :
    - The name if this band is the Talking Heads , on sautille ?
    - Live at Leeds - The Who, sans faire tournoyer le micro du karaoké, vous allez péter la tv et le fil made in japan (tiens donc) avec...
    - Stage et David Live - David Bowie... méthodiques, calculés, classe...
    - UK Live avec Bozzio, en pleine forme et en trio voulant faire oublier ELP et rappeler FZ
    - Welcome Back My Friends - ELP, long parfois trop, mais tout de même sacrée époque et puis, tarkus, en un trait faut tout de même y'aller...
    - Genesis Live (le premier avec PG). the knife et son orgue... peter au théatre...
    - Beck Boggert and Appice Live rien que pour superstition
    - Jeff beck with the Jan Hammer Group Live rien que pour freeway jam
    - Maxwell MTV Unplugged rien que pour la voix sur harpe et ce groove à l'acoustique de mr wah wah watson ici, sans wah wah (le pauvre)
    - Eric Clapton et Steve Winwood "madison square", nostalgie, pour sur...
    - William Sheller "en Solitaire" grandiose
    - Alain Bashung "La Tournée des grands espaces", folie, ouais...
    - Stan Getz "Anniversary", limpide évident, cool et tellement...
    - Got'v 'The Mules le triple live... sacrée jam session (le spanish moon de littel feat... un régal)
    - Neil Young "Rust never Sleeps" le crazy horse (pas celui des filles à paris...) en pleine saturation qui se prend pour des punks (my my hey hey, hymne au rock...)
    - Tangerine dream "encore". pour s'engouffrer dans un sommel profond
    - Hall and Oates - Livetime. show ricain oblige
    - Jimmy plays Montery - Hendrix, sans cramer sa guitare ou sa chaîne pour autant...
    - Henry Cow - Concerts, pas au réveil...
    - Van der Graff Generator - Still Live ça rugit Hammil de partout...
    et tant d'autres... forcément.
    Un bon exercice que de se baisser et fouiller dans les meubles à vinyles... et activer la case nostalgie mémoire...

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  12. Pas très original, tout ça !!!
    je vous propose Sam Cooke (at the harlem square club), Larry Corryell (at the village gate), John Sebastian (Cheapo Cheapo real live), Eric clapton (ec was here), Traffic (welcome to the canteen), Van Morrison (it's too late to stop now), David Johansen (live it up), J Geils Band (live at full house), style Council (live: home and abroad), Hot Tuna (At san francisco house), Bob Dylan & the Band (before the flood), everly brothers (reunion concert) et entre autres, je ne sais si quelqu'un l'a cité, le Live at Edmonton de Procol Harum !

    Bonne compet' à tous

    AIROE

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  13. Imparable. À classer dans le Top 10 des meilleurs Lives de tous les temps.

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  14. Ritchie qui oublie le riff de "Smoke on the Water"
    Dans Get yer yaya's out, Mick Taylor oublie aussi son solo dans "Sympathy for the devil". Du coup il y retourne pour le plus grand bonheur de tous.

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