L'art, c'est la sublimation de la vie et de la mort. L'art, dit-on, c'est le sexe. La même chose. Onirisme à tous les repas. Les plus ancestrales et caricaturales murder ballads, chansons du Barzaz Breizh Breton ou ballades anglo-irlandaises nous rappellent toutes des drames, des histoires d'amour, la simple joie de vivre, la fatalité de la mort. A quoi peuvent bien servir les cantiques, les chansons d'amouuuur (ah que je peeeuse la question), les chansons bêta de colonies de vacances chez les scouts, le Rehab d'Amy Winehouse, si ce n'est qu'au-delà de l'événement de l'instant, il est essentiel de le sublimer, d'en retenir la substantifique moelle, le digérer pour mieux le communiquer. Les Chants de Lutte de Théodorakis ne chantent rien moins qu'un espoir (ancestral, car basé sur des airs traditionnels - oh le beau terme galvaudé - mis en musique sur des poèmes bien de leur temps) mis en musique faute d'être accomplissement politique. Un jour viendra...
Tiens, Theodorakis, encore lui, au lieu de danser le sirtaki une fois les Colonels évacués, a tenté les Chants de Matthausen. Exorciser, dépasser, pour comprendre et digérer. Mêler l'esprit de la chose - la Bête - à nos pauvres ressentiments. Que les hommes puissent s'approprier et digérer ces horreurs qui les dépassent dans l'actualité du moment. Encore une fois, les sublimer. Prends un pinceau, un maillet, un ciseau, sculpte, décris, rappelle, immortalise. L'art, c'est ça.
Alors bien sûr, quand Simple Minds nous raconte l'histoire de l'Irlande du Nord, ou U2 Martin Luther King on peut rire. Mais pas trop quand même, parce que notre belle jeunesse, entre deux Malibu, apprend à s'en émouvoir.
Quand un artiste comme Steve Reich se permet de composer une oeuvre sur le 11 septembre, et qui plus est, balance une photo significative de l'événement sur la jaquette du CD, on s'offusque, on tousse, on s'indigne. Et l'on entend même pas le Kronos Quartet jouer le truc avec une intensité sans égale. Grands dieux ?!!! Une telle horreur ne saurait être vulgarisée par un artiste, ne saurait être intellectualisée en une musique que même les ascenceurs ne toléreraient pas.
Les mêmes critiques ont déjà oublié Different Trains, du même Steve Reich, qui avait à l'époque tenté, de la même manière de transcender la Shoah. On ne peut pas intellectualiser une telle horreur, dira-t-on.
Qui parle ici d'intellectualiser ? Bordel de merde c'est de la musique ! Certes moins évidente au premier abord qu'une gouaillante du pauvre Bono, mais faut-il que seuls les sourds aient droit à l'acceptation d'un drame sublimé part l'Art ? Au nord, c'était les Corons. Point barre. Et de censurer une pochette trop explicite car on n'a pas le droit de profiter de l'actualité pour créer. Qui oserait admettre que les événements du 11 septembre 2001 aient profité à quiconque ? Les adeptes du complot. Ceux qui prétendent que tout ça n'était que facétie et opportunité indécente pour oser la razzia sur la schnouf, entendez le baril de pétrole brut, là-bas. Il paraît que Georges Bush arrive encore à verser une larme (de Jack Daniels), quand on lui en parle. Oublions donc la guerre d'Irak, c'est indécent.
Oublions la politique.
Qui oserait reprocher à Dylan d'avoir écrit Blowin' In The Wind ? Certainement pas Columbia Records.
Mais là, voyez-vous, Steve Reich, c'est qui ? Un musicien avant-gardiste, osant, alors qu'on l'avait quand même subventionné pour faire de l'art pour l'art (entendez par là, vivre décemment dans un appartement à New-York), mettre les pieds en plein Ground Zero pour tenter d'offrir aux New-Yorkais, à l'Amérique, au monde, une tentative d'éterniser ce sinistre événement grâce à la seule chose qui nous fait humains, conscients, sensibles - l'art.
Ces pisse-froid oersaient-ils critiquer le Guernica de Picasso ?
Ce post, politiquement incorrect, est déjà bien trop long. Je sais qu'ici, je ne m'adresse pas à des imbéciles, et que si je leur promet que le Mallet Quartet à suivre est un rien moins émouvant que l'oeuvre critiquée, ils écouteront. Et que les Dance Patterns méritent, malheureusement via nos blogs méprisables, une plus large audience que celle humblement tentée par Nonesuch Records, qui n'a pas les moyens de promouvoir cette merveille, définitivement non pas interdite, mais nécessairement ignorée par les - euh - mass media pour cause d'indifférence massive.
Car, ce que vous entendrez ici est magnifique autant que terrible. Pas facile, si vous venez de larguer les écouteurs de votre iPod, mais déroutant et essentiel. Pour la petite info, le CD est fourni avec un DVD reprenant tout cela avec une qualité et une promesse de plaisir incroyable. Car, c'est de musique dont on cause ici. Pas de politique.
Une fois n'est pas coutume, voici un lien vers la Fédération Nationale d'Achat des Cadres (FNAC) qui devrait vous permettre de jubiler légalement de la chose, avec un peu de multimédia en 5.1 car finalement, les attentats du 11 septembre, s'ils servent la croissance, c'est plutôt une bonne chose, non ?
Non.
Définitivement non.
Si vous en êtes d'accord, cliquez ici.
Pour l'instant, je charge mais là, je sais que je ne serai pas déçu.
RépondreSupprimerLes affaires repartent fort.
De quoi se réchauffer l'âme. Mais enfin, sur ma Côte d'Azur, je ne me plains pas trop du froid, surtout après avoir vu le reportage sur Brantôme au JT de ce soir... ;-)
... et j'en ai eu pour mon compte. Je persiste à trouver Steve Reich un des compositeurs les plus intéressants de ce dernier demi-siècle.
RépondreSupprimer@psegpp : moi aussi !
RépondreSupprimerJ’adhère de façon inconditionnelle à l'oeuvre de Steve Reich.
RépondreSupprimerL'un des "répétitifs" de l'école américaine qui ne s'enferme pas dans son mode d'écriture, mais qui n'a de cesse d’évoluer et de faire progresser ce langage.
Ce nouvel opus le prouve, une oeuvre en tout point passionnante et dont effectivement on se doit bien, au delà de toute considération politique (et quoique...), d'apprécier la pertinence.
Sur, moins basique que Miss Sarajevo... mais l'art heureusement n'est pas réservé qu'à l'omnipotence médiatique, il est protéiforme et peut véhiculer (doit) la société qui lui est contemporaine sous toutes ses formes de ressenti, d'acte ou d'opinion.
Mozart l'a fait, Wagner aussi, Messiaen bien sur, Dylan, et tant d'autres... Alors on fonce sur ce dernier opus de S Reich, d'actualité musicale, et artistique, forcément et d'actualité tout court, normal, vu le sujet.
Steve Reich. je ne connais et me suis refais à l'occasion un "bout" de "Music for 18 musicians" Je n'ai pas eu ou pris le temps de l'adopter comme un P Glass. Moins médiatisé? moins prolifique? Moins séducteur?? je ne sais pas :-(
RépondreSupprimerTiens tiens ECM!!
Envoie moi au ciel Steevie.
RépondreSupprimerRenaud
Salut Jeepeedee,
RépondreSupprimerJe sais que je n'interviens que trop peu sur ton blog - mais aujourd'hui je me suis procuré un double "To", alors j'en profite pour me délecter de mes absences musicales, dont cet album de Steve Reich interprété par le grand quatuor Kronos Quartet qui a illuminé dans sa joute de cordes tant de bonheur sonore.
Je reste un grand fan de Steve Reich, depuis l'achat de son œuvre Music For 18 Musicians en 1978 sur le superbe "label" ECM, puis en 1980 Octet / Music For A Large Ensemble / Violin Phase sur ce même "label", jusqu'à me procurer en 1997 son anthologie Works: 1965-1995 chez Nonesuch... évidemment j'ai assisté aux chorégraphies de Anne Teresa De Keersmaeker avec sa consœur Michèle Anne De Mey, et il faut assister à cette intensité minimaliste chorégraphiée tout en circularité, j'espère qu'il existe une trace audiovisuelle (merci de m'en faire part)…
Bref, encore un grand merci pour ce Post.
Bien à Toi.
Bonjour, Bonsoir,
RépondreSupprimerJe suis un petit Anonyme qui me délecte de ce blog depuis quelques temps, et voilà que je peux apporter une petite (double) info à projectobject (ça sonne bien Zappa ce pseudo non ? ...) :
Anne Teresa de Keersmaeker fait une reprise de sa sublimissime choregraphie "Fase" en tournée dans le monde, et au Centre Pompidou (pour les Parisiens) le 3 et 4 mars 2012
(http://www.rosas.be/fr/agenda?y=2012&m=3)
... et pour les autres, on peut le trouver (très bien filmé) en DVD :
http://www.rosas.be/fr/film/fase-four-movements-music-steve-reich
Extrait : http://artsalive.ca/en/dan/mediatheque/videos/videosDetails.asp?mediaID=377
(à Beaubourg en vente à la librairie, pour les Parisien toujours)
Merci encore pour ce Blog, & Keep On Going Guys !!!
Wazoo
Salut Wazoo,
RépondreSupprimerD'abord je tiens à te remercier pour les infos que tu m'as fournit, je vais tâcher de revoir cette chorégraphie merveilleuse d'Anne Teresa de Keersmaker au Centre Pompidou (dans l'espoir d'un ticket libre pour au moins l'une des dates)… et j'encourage ceux qui ne connaissent pas de visualiser ton lien:
extrait video: Fase: Four Movements To The Music Of Steve Reich (1997).
Et j'espère que les documents DVD restent toujours disponible à la vente à la librairie du centre.
Par ailleurs, tu es très perspicace sur mon pseudo, aussi je te propose de faire un tour sur le site de Jimmy:
Le Club Des Mangeurs De Disques,
et principalement sur son Post dédié à Frank Zappa:
Frank Zappa's Fan Club
sur lequel j'ai déposé quelques documents intéressants, au-delà de la discographie officielle du Maître.
Bien à Toi.
J'y vais de ce pas !
RépondreSupprimerMerci &
Music is the best ...
Wazoo