En ces périodes de fête, on bouffe n'importe quoi, n'importe comment, et c'est ça qui est bon. Trop de foie gras, trop de chocolat, beaucoup trop d'alcool, comme si le vieil adage - ce qui est pris n'est plus à prendre - semblait calmer nos angoisses à la veille d'une nouvelle année. Comme si, le fait de passer du 21/12 au 01/01 signifiait qu'on remettait les compteurs à zéro, qu'on tentait le super-banco au risque de tout perdre. Alors on se plait à entendre le coucou chanter avec de la monnaie dans sa poche, on accroche du gui au plafond, en attendant de faire sauter les crêpes avec un louis d'or dans la main, de fêter la résurrection du Christ avec des fayots (les apôtres ?) et du mouton (nous-même ?). On est presque content d'acheter des chrysantèmes plutôt que de se les faire offrir quand les frimas reviennent...
Bref, on ritualise nos angoisses comme on peut, jusqu'à laisser Facebook publier un petit récapitulatif de nos "j'aime" de l'année, comme s'ils avaient à eux seuls constitué et résumé les événements marquants du passé...
Du symbolisme en veux-tu en voilà, ça nous rassure, ça nous angoisse gentiment aussi (les Illuminati nous guettent, mais bon, on aura fini de payer la télé avant...).
Alors voilà un disque parfait pour cette époque de crise de foi(e). Impossible de passer à côté de la pochette, et encore moins du titre. Ambassadeurs de la paix et de la magie du 21ème siècle. Le pauvre Lou le chantait déjà sur son ténébreux Magic & Loss. I need magic, I don't wanna die... Un peu de magie dans ce monde de brute. Un peu d'irrationnel, je sais pas moi, rencontrer un vrai ami grâce à Facebook, télécharger une version pirate de Photoshop qui fonctionne, n'importe quoi, pour échapper au quotidien forcément banal (le mac qui pète 15 jours après la fin de l'Apple Care, des choses comme ça).
Pour être honnête, j'ai découvert ce disque dans les chiottes en lisant le hors-série de Rock & Folk. Dans un endroit donc ou tout un chacun est prêt à laisser ses espoirs, ses envies et ses rêves, avec un magazine sur les 500 meilleurs disques du monde, dont on possède les 399 premiers (en gros, tous ceux d'avant 1985, au hasard) et dont on se fiche du reste.
La suite est encore plus magique : par flemme de télécharger le boudin qui comme tant d'autres ne vaut même pas 80 Mo sur un disque dur, une écoute sur Spotify en passant le balai (une grande journée pour moi, vous l'avez deviné !), et... ben replay. Replay sur Spotify !!! Sans blague, je crois que ça ne m'est pas arrivé souvent.
Tout ça pour dire que ce n'est pas, contrairement à ce qu'en dit Rock & Folk, un album essentiel dont on se souviendra dans 10 ans. Mais qui donc pourrait, en 2014, écouter Sergent Pepper ou Fun House en boucle, comme ça ? Pas moi. Les Foxygen (ce nom !) font bien mieux que ça : ils sortent un album qu'on va consommer comme une boite de Pyrénéens, jusqu'à en avoir mal au ventre et à n'y plus toucher jusqu'aux Ferrero de l'an prochain. No Future pour les Foxygen, ne me parlez pas du groupe du siècle. Mais pour moi, pour aujourd'hui, et jusqu'à demain, c'est parfait. Je viderai sans doute la corbeille sans regret, mais bon, comme disait l'autre, carpe diem.
A quoi ressemblent-ils ces zazous ? A des petits rigolos qui ont tout compris. Ambassadeurs de la paix et de la magie ? Oui, un peu comme si là, au 31 décembre, nous allions basculer en 1967. Vous admettrez que la tâche n'est pas facile, sorte de Graal du groupuscule nostalgique, nourri de bon goût et pavé (voire planté par) de (trop) bonnes intentions. Sauf que là, au copier/coller bêta qui ne dure qu'un temps (remember Lenny Kravitz et Oasis ?) nos petits magiciens provisoires semblent adapter la méthode bien comprise de l'oulipo, la littérature sous contrainte d'où nait une nouvelle création à la fois complètement fêlée mais aussi globalement maîtrisée. Je m'explique : prenez une bonne chanson, un bon titre (San Francisco, au hasard, fallait oser !) collez-lui la contrainte d'appliquer à la lettre les arrangements de Hello Goodbye - au hasard (In The Darkness), mais ça marche aussi avec Under My Thumb (On Blue Mountain) ou... San Francisco (enfin, Be Sure To Wear Some Flowers In Your Hair pour les puristes non Johnnyphiles) avec San Francisco (petits crétins ! voyou !). Ben figurez-vous que si la matière de base est solide, la méthode fonctionne et le nostalgique comme le nouveau venu y trouvent leur compte. Si la chanson est bonne, comme disait l'autre. Sinon, bien entendu, c'est le fou-rire assuré. Ceci dit, nous sommes bien d'accord, cela ne fera pas de vous l'auteur d'un prochain Rock Bottom ou Egge Bamiyasi. Simplement, cela fait illusion, et dans notre monde si rationnel, de l'illusion à la magie, il n'y a qu'un pas. Tout ça ressemble malgré tout à - disons - des Flaming Lips jouant à "dessinez c'est gagné".
Ceci étant, la chose ne manque pas d'attrait, et pour les nostalgiques des jours de paix, d'amour et de musique, cela devrait leur permettre de calmer leur angoisse le soir du 31 : oui, il y aura encore et toujours des trucs qu'ils pourront adorer l'espace d'un instant en 2015. John Lennon Uber Alles.
Ceci dit, pas d'affolement, les Foxygen sont déjà morts. Ils viennent de sortir le même album (en y utilisant la méthode Beach Boys et Dylan façon Sad-Eyed Lady Of The Lowlands, notamment). Il s'appelle très justement ...And Star Power (nos Ambassadeurs sont semblerait-il sur la route du succès (plus de 3 millions d'écoute sur Spotify rien que pour San Francisco), les masses vont adorer pendant six mois et basta). Les curieux avides de télécharger deux fois la même chose trouveront leur nouvel opus au supermarché, mais je vous préviens, rien ne vaut la première gorgée de bière comme disait le père du phoque pleureur. La suite a déjà le goût du dernier marron glacé qu'on a oublié dans la boîte et qu'on mange par acquis de conscience parce qu'il ne faut pas gâcher.
No Destruction.
PS : je dédie ce post à l'ami Jimmy, reviens-nous vite, c'est pas mes deux posts tous les six mois qui vont consoler les copains !
Toujours un plaisir de te lire.
RépondreSupprimerMerci !
SupprimerPetit disque sympathique qui s'écoute facilement. Il n'y a quand même pas de quoi se relever la nuit !
RépondreSupprimerNon, c'est sûr, il sera oublié dès demain, mais pour l'instant il me plait bien...
SupprimerJ'ai bien aimé celui-là mais une oreille avertie aura repéré divers emprunts à droite et à gauche limite plagiat. Cela ne me dérange pas tant que c'est dans une démarche créatrice et novatrice. Là, ça l'est donc pas de problèmes!
RépondreSupprimerà conseiller pour écouter ou pour jouer à "Mais où ai-je entendu ça?".
Bon choix néanmoins.
Trois posts dans la foulée: merci d'avoir assuré pendant mon absence!
RépondreSupprimerComme un gland, j'ai également acheté le hors-série de R&F, alors que ce n'est qu'une réplique des trois précédents que j'avais déjà!
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