J'ai acheté des CD depuis 1986 (et plein de vinyles avant), j'y ai mis énormément d'argent. J'en ai souvent racheté (remasterisations, bonus tracks...) et aujourd'hui tout ça ne vaut plus rien. Les rayons se vident au profit des DVD, des blu-ray disc (tout pour les yeux, rien pour les oreilles), en attendant le prochain format.

Et pourtant... c'était pas beau tout ça ?


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lundi 12 novembre 2018

#217 John Hartford "Aero-Plain"



Ca faisait longtemps, longtemps, que je voulais rendre hommage à ce monsieur. De préférence, au travers d'un album complètement ignoré lors de sa parution, et que l'on retrouve - miracle, enfin, normal, ça leur coûte pas un rond et 90 Mo de stockage - sur les plateformes de téléchargement. Même mes amis russes qui m'abreuvent de torrents de musique (et non, pas de vodka) n'en ont cure. Diable !

Alors, roulement de tambours de banjo, voici John Hartford, un musicien hors-pair, au banjo donc comme au violon, qu'il délaisse ici (c'est Vassar Clements qui s'en occupe, ça va, donc). Ceci étant, ne fuyez pas. On entend bien ici de la musique acoustique au tempo enlevé qui rappelle la ligne bleue du Kentucky, mais pas tout à fait quand même, car le bonhomme est sacrément dérangé.

Elevé au statut de gloire éphémère suite à son tube pour le moins mainstream Gentle On My Mind, que n'aurait pas renié un Neil Diamond, le bougre ne transformera jamais l'essai. Musicien surdoué, complètement cinglé, l'homme n'aura de cesse de sortir des albums qui dérangent, comme celui-ci (on trouve un titre invitant rien de moins qu'à détruire le Grand Ole Opry, donc forcément ça facilite pas le copinage) ou encore de proposer, sur scène, des one-man shows au banjo et aux claquettes, coiffé de son indécrottable chapeau melon. C'est à lui que les frères Coen feront appel pour la musique de O Brother, notamment pour les arrangements old-time que ses pairs semblaient incapables de jouer. Un petit magot qui ne servira malheureusement qu'à lui payer sa chimio. Bye bye, John Hartford.

N'empêche que le monsieur avait tout pour (me) plaire. Ce qu'on entend ici va du bluegrass joué avec une finesse introuvable chez celles et ceux qui semblent aligner les notes à toute vitesse comme s'ils avaient un train à prendre. Et qui plus est, des chansons, surtout. Des mélodies, des arrangements de rêve. Et cette voix... On croirait entendre un croisement improbable entre Earl Scruggs et Joe Dassin. Et l'on en vient à se demander pourquoi diable le grand Joe n'a jamais puisé dans ce répertoire pour se tricoter des adaptations qui auraient fait trembler l'Olympia, si, si.

Et parfois aussi, c'est complètement barré (Boogie) ce qui n'est guère étonnant. Les musiciens fumaient de l'herbe, jouaient un traditionnel pendant une heure ou deux, jusqu'à ce que cela ressemble à quelque chose. Ou pas.

Ainsi donc voilà, un peu en réponse à Jimmy, un cas très très rare où la technicité n'enlève rien à la folie, et donc au génie. L'homme savait jouer plus vite que son ombre, et même que l'ombre des copains de l'époque, mais de cela on ne trouve rien ici. Merci.

Alors donc, ne devriez-vous écouter du bluegrass qu'une fois dans votre vie, c'est le moment où jamais.

Turn You Radio On

9 commentaires:

  1. C'est la deuxième fois dans ma vie que j'écoute du bluegrass (la 5ème si je compte mes trois visionnages d'O Brother), la première c'était l'un de mes all-time favorites Jim White qui s'était acoquiné avec un certain Packway Handle Band. Je te recommande ce disque, aussi ignoré que celui dont tu nous parles aujourd'hui mais moins bon, faut pas déconner : des trésors cachés comme ça si t'en as d'autres je suis preneur.
    Thanxxxxx

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    1. Merci Everett. Tu peux tenter les autres albums des années circa 1970. Gum Tree Canoe est bien aussi (y'a des reprises à sa façon des Stones) et son album éponyme, avec sa fugue en la majeur pour cordes, cuivres et banjo...)

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  2. J'avais trouvé un Lp du Monsieur en fouinant dans les bacs de Music Action au carrefour de l'odéon à Paris, une superbe boutique d'imports US ! L'album en question Dillard, Hartford, Dillard "Glitter Grass From the Nashwood Hollyville Strings", un très bon disque, que j'ai pris pour les références: Les Dillards, et puis Doug Dillard avec l'album que j'avais adoré avec Gene Clark; et puis les références au nouveau blue grass de l'époque avec les New Grass Revival de Sam Bush et le Nitty Gritty Dirt Band, que des albums à revisiter, et bien sûr
    John Hartford en fait parti ! Merci pour le partage, j'apprécie. Pat

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    1. you're very welcome ! Un disque immense, tu verras. Et oui, la famille Dillard savait s'entourer. Et d'après wikipedia, c'est cet album qui a contribué à la naissance du newgrass dont tu parles. On se demande juste la signification du terme grass en fait ;o)

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  3. Tu sais, je pense que c'est parti de Californie cette affaire, et puis aussi comme tu le dis, ils se démarquent tous du Grand Ole Opry de l'époque, malgré la visite vers 68 des Byrds là-bas. Personnellement j'ai tout de suite accroché avec cette musique: le "Sweetheart of the Rodeo" en premier, par le biais d'Hillman surtout, mais juste derrière je me prends le "The Fantastic Expedition of Dillard & Clark" puis c'est le Nitty avec l'extraordinaire "Will the Circle Be Unbroken" mais aussi "Uncle Charlie & His Dog Teddy", bon et puis aussi les Dillards, mais Country Gazette, et puis des mecs comme Gene Parsons "Kindling" en 73, et un groupe comme Muleskinner avec Clarence White, les New Grass Revival qui reprennent sur leur 1èr Lp, Jerry Lee Lewis "Great Balls Of Fire" et Dillard & Clark "With Care From Someone" Magifique ! et le "Old & in the Way" aussi avec Jerry Garcia, ben oui! Et effectivement le "Aero-Plain" et vraiment un Superbe Album ! Merci

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    1. Faut vraiment que j'explore les aventures de ce monsieur Dillard. Le reste me parle et j'avoue avoir total craqué sur Old & In The Way, quelle spontanéité ! Et les Nitty, bien sûr. Je te conseille vivement Gum TRee Canoe du même John Hartford, d'ailleurs je vais peut-être bien le poster en commentaire, stay tuned.

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  4. Merde, coincé chez moi en ce Samedi... Le boulot. Je pensais pleurer sur mon sort avec le Marianne Faithfull. Et puis je suis passé gentiment sur ton disque. Et j'ai bien fait, je tombe sur "Boogie" me marre, j'entends "Presbyterian Guitar" et je fonds. Hop, ni une ni deux, je me le remets plus fort, j'attaque un Risotto légumes et je vais m'ouvrir un beaujolais nouveau. Va bien avec ce disque, c'est un avis. Hop, bonne combinaison!!

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