Je les ai aimés, Fauve. Pour autant de mauvaises raisons, sans doute, qu'il y en a de bonnes pour les détester ou - mieux encore - les ignorer.
Tout ça a commencé par un trajet Niort -> Nantes via blablacar. Le chauffeur, un djeun de 27-28 ans dans une belle Mégane tunée vitesse et accélération a passé le CD de Vieux Frère # 1 pendant tout le trajet, c'est-à-dire 3x d'affilée, quand même. Cette musique m'a d'abord fait doucement rigoler dans ma barbe, ce vieux sourire de vieux con que vous connaissez tous, puis elle m'a agacée, et arrivé à Nantes, à un arrêt de tram en banlieue en novembre, j'ai cherché Fauve sur Deezer. Et là, dans l'atmosphère si chère à Barbara, dans un tram glauque, leur musique a pris tout son sens.
Huit mois plus tard j'étais aux Francofolies. Carrément. Fauve a joué après IAM. Les vieux lions se retiraient, avec un putaing de sacré panache, soit dit en passant, et les jeunes loups prenaient la suite. Avec, semblait-il, la même intégrité, la même foi et la même rage que les tchatcheurs de Marseille. Et là encore, malgré l'écran géant flouté et son message à trois balles (nos gueules n'ont pas d'importance, c'est le message qui bla bla bla), malgré la guitare euh... bon, malgré les hormones adolescentes qui bruinaient sur Saint-Jean d'Acre, au lieu de me finir à la bière (c'est pas moi qui conduisait), je suis resté bouche bée - bêêh direz-vous, oui, peut-être - et j'ai écouté le maxi Blizzard en rentrant.
L'année suivante, j'ai attendu fiévreusement la sortie de l'album, Vieux Frère #2, et je l'ai trouvé chouette. Non, ils ne se renouvelaient pas trop les petits gars, non, pas de progrès sidérants à la guitare, mais après tout c'était bien la suite de Vieux Frère #1 et les textes étaient toujours aussi percutants.
Percutants ? Le vieux Jeepee délire ! Retombe en enfance !
Ben oui, peut-être. Avouons-le nous, entre vieux cons qui bloguons à grand coup de Nick Drake, à qui moque l'autre qui écoute Ange pendant que l'un se pame sur cette vieille loutre ménopausée avant l'âge de Lou Reed ! On se rêve encore jeune, avec de la musique de vieux.... On voudrait... revivre. Ca veut dire, on voudrait vivre encore la même chose. Ben ouais, Gérard, t'as peut-être raison, reprends un coup de blanc et lâche cette guitare, tu nous chanteras Phèdre demain, t'as plus de voix !
Je me suis imaginé revivre, avoir à nouveau 27 ans, en écoutant Fauve au lieu de Nick Cave, (ou même... Manset ?) c'est plausible, non ? IAM me gonflait à l'époque, trop rigolo, trop politique, mon drame était intérieur. Le même que celui du p'tit gars qui braille dans Fauve, en fait. Et comme Fauve, de manière à peine voilée (de façon aussi maladroite que les Louise Attaque singeant les Violent Femmes en français dans le texte), évoque les années SIDA des Nuits... Fauves (vache, les jeunes, faites un effort quand même !) tout cela est complètement raccord. Comme, à l'époque, rêver du grand amour quand ça commençait à tomber comme des mouches autour de moi, là-bas chez les corbeaux rennais, tout cela est bien désuet. Peut-être, mais ça colle. Je me rêve jeune avec de la musique de jeunes.
Des jeunes qui voulaient avancer, rien lâcher, tout ça tout ça. Résultat, au bout de 3 ans, dépôt de bilan (soit disant provisoire, mon cul, restez donc six mois à profiter de votre blé et vous allez avoir du mal à nous chanter le blues du mangeur de nouilles, les p'tits gars). L'histoire se répète, mon Gégé, c'est la même pour tout le monde.
N'empêche que même dans leur cadeau de départ - dernière fournée d'oseille avant l'autoroute - je les trouve classes et fidèles à eux-mêmes. Entre-couper les extraits de concert par de petits témoignages, comme ça, là, ça me rappelle un peu le Nitty Gritty Dirt Band à l'époque de leur live qui... Oh ta gueule vieux con.
Euh... ouais, vous avez raison. A choisir, je me verrais plutôt dans le rôle du vieux frère...
150
900
Du rap chez JeePeeDee ? Et pourquoi pas de la musette chez Zornie et du visual kei chez Jimmy ?!?!?
RépondreSupprimerJ'ai quand même fait l'effort d'écouter et, soyons clairs, j'ai connu pire. Pour commencer, le chanteur a une "vraie" voix et en joue avec talent. Les orchestrations sont plutôt légères et variées.
C'est largement écoutable… mais peut-être pas trois fois d'affilés !!!
Ben oui ?!! Ah bon ? J'en avais jamais posté ?
SupprimerJe me rappelle pas !
SupprimerFauve entre Manset et Dylan, ça fait quand même relou (comme disent les djeun'z !)
Ca fait du bien, non ?
RépondreSupprimerC'est vrai, souvent, je me sens vieux - peut-être même davantage que ne l'indique mon âge... Nick Drake me bouleverse encore comme au premier jour... Je ne me suis jamais moqué de ceux qui écoutent Ange, c'est mon narrateur qui s'en charge! Lou Reed (tu pourrais avoir pitié des disparus) n'a jamais été plus "vieille outre ménopausée" que Neil Young ou Leonard Cohen (que je comptais jadis parmi mes préférés et qui sont devenus mes têtes de Turcs préférées)... Moi, aussi, j'aimerai "revivre" mais certainement pas pour écouter Fauve. J'ai écouté leur premier effort et j'ai trouvé ça totalement bidon, comme on disait dans les sixties de ceux qui voulaient avoir l'air mais n'avaient pas l'air du tout, de ceux qui se contentaient de suivre sans se donner la peine de se livrer vraiment. Fauve me fait penser à ces "plasticiens" qui collent un œil de Picasso à droite et une robe de Klimt à gauche en voulant nous faire croire qu'ils ont inventé la peinture, alors qu'ils n'osent même pas ouvrir un tube et de dissimulent sous des branlettes assez nauséeuses. Je préfèrent encore les gamins qui se font croire, fringues et guitares vintage en avant, que nous sommes encore au milieu du Swinging London. Je préfère des passionnés qui rêvent en se mirant dans la glace du rétroviseur que ces faiseurs glacials qui font semblant de s'agiter à l'intérieur d'un cercle soit-disant ouvert sur une liberté en carton.
RépondreSupprimerMerci pour ton commentaire. Je suis 100% d'accord avec toi, j'ai les mêmes émotions : on me flatte beaucoup plus facilement les tympans avec une posture connue et aimée, fusse-t-elle issue du Swinging London ou du Berlin krautrock. D'où cette question que je me pose, et ce plaisir à me laisser aller avec Fauve, quitte à me faire avoir, ce qui semble être le cas si j'en crois ta prose sans appel. Tu cites Neil Young et Leonard Cohen comme têtes de turc préférées, j'y rajouterais volontiers Dylan avec ses bêlements Sinatriques de fin de soirée, et ces vieux cons m'énervent. Combien de disques de Neil Young ai-je acheté, écouté vaguement une fois, puis rangés ? Moi ça me donne envie de passer à autre chose parfois, et si le moment s'y prête, je plonge...
SupprimerJe crois qu'il n'y a qu'en France qu'on se prend autant la tête sur un groupe pour savoir si il est "authentique", "neuf" ou je ne sais quoi. Le pire mot, c'est même "crédibilité". Il faudrait à tout prix l'avoir pour être accepter ou pas par l'intelligentsia rock... Que c'est triste...
RépondreSupprimerEt, comme d'habitude, ton texte tape très juste. Pour ma part, je préfère que les ados ou moins jeunes écoutent Fauve que bien des choses qu'on veut leur/nous revendre au nom de cette plus grande crédibilité...
Donc, Fauve remet en scène un rapport avec la/notre jeunesse, c'est tout à fait ça. Je ne connais que le premier mini.
La vraie question, c'est: vont-ils durer? Vont-ils creuser une vraie œuvre ou continuer pour incarner une caricature? Ce serait triste qu'ils deviennent des caricatures trop vite car ils donneraient raison à toute l'intelligentsia qui leur a cherché des poux (qu'ils avaient peut-être d'ailleurs mais on s'en moque). Parce qu'on manque quand même de vrais nouveaux groupes dans ce pays capable d'être à la fois populaire, de parler à une génération et que les vieux puissent également entendre sans se dire qu'ils sont trop vieux pour se faire avoir... Moi, j'ai envie de me faire avoir un peu plus souvent. Donc je vais réecouter Fauve. Et leur laisser leur chance.
Merci pour ton commentaire. Je ne sais pas si un jour (oui, peut-être un jour, mais pas des années) un artiste sera à nouveau capable de parler à une génération comme certains l'ont fait pour la notre (et continuent, post-mortem ou gateux, de le faire pour les suivantes). J'y ai cru avec Fauve, les conditions, mon état-d'âme, faisant sans doute que ça a marché à ce moment-là pour moi. A écouter ce live, à froid (façon de parler), je n'ai pas trop su quoi en penser, d'où ce post en forme de question... Je n'arrive pas à les prendre pour des nigauds.
SupprimerJe suis vieux et con, mais je continu à écouter ce qui passe (sans doute pour me sentir moins vieux et con), et j'ai donc écouté Fauve (j'en ai même posté sur le CMD via un lustucru). Chez Fauve, de la communication à la musique, tout sonne faux à mon oreille et pue le marketing. Il y a certainement pire (il y a toujours pire), mais il y a tellement mieux que je n'ai pas eu le courage d'écouter celui-ci. Et puis, c'est quoi cette histoire de jeune: j'ai débuté avec les Beatles, alors qu'ils étaient déjà séparés, et lorsque je me suis mis à Charley Patton, il était mort depuis lurette!
RépondreSupprimerEncore une fois, d'accord avec toi, je fais pareil, j'écoute ce qui se passe et je jette les 3/4 du temps pour cause sans appel : pas crédible. Fauve a fonctionné avec moi, alors que Feu! Chatterton, La Femme ou d'autres, niet, pas question. Je suis plutôt content de faire plaisir à mes oreilles.
SupprimerJe n'avais pas compris. Faut faire court et dire qu'on aime bien pour avoir le droit à un retour!
RépondreSupprimerTu pousses le bouchon un peu loin, là. Permets-moi de lire mes messages et d'y répondre 1x tous les deux jours si le coeur m'en dit. Quant à oser dire qu'on aime pas, j'ai pris des volées de bois vert en le faisant chez toi, alors... Au contraire, Fauve m'intrigue, et ta vision certes sans appel vaut évidemment celle des autres !
SupprimerDésolé de t'avoir réveillé! (On peut plaisanter un peu, non?). Evidemment que tu as pris des volées de bois vers car si j'accepte qu'on ne soit pas de mon avis (surtout s'il y a des arguments), je défends toujours mes posts avec passion. Ma vision n'est pas sans appel, je ne prétends pas posséder la science infuse ni être le détenteur absolu du bon goût (quoique!) mais, même en notre époque troublée, j'ai la faiblesse de penser qu'il existe beaucoup plus intéressant que Fauve. Tu as tout à fait le droit de penser autrement. Cela peut ressembler à un échange de points de vues, sauf qu'à aucun moment (et c'est rare chez toi), je n'ai lu quelque chose qui pourrait m'aider à comprendre ce qui te plaît chez Fauve. Rien de grave...
SupprimerVert et non vers.
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